samedi 20 mai 2023

400 Otta...wet, mouillé, rainy, pluvieux ...


Prologue


La troisième épreuve qualificative pour PBP 2023 se profile déjà. Ce 400 inédit vers la capitale fédérale est jugé facile, avec ses 1700 mètres de D+ seulement. À titre d'information, pour un brevet de la catégorie du Paris-Brest, il faudrait 1000 mètres de D+ par tranche de 100 km, soit 4000 mètres pour un 400 kilomètres.

Du coup, cette balade vers Ottawa est cochée par plusieurs randonneurs, adeptes du PBP ou non. C'est donc une vingtaine de participants qui s'annonce sur le site du CVRQ. 

Cependant, la météo en yoyo de ces dernières semaines, risque d'être vraiment exécrable pour ce samedi. Ce qui provoque une discussion acharnée sur Slack, notre forum du club sur le net. Tout le monde y va de sa méthode pour prévoir la quantité de pluie qu'on va recevoir 5 sur 5 lors de la randonnée. 

La seule inconnue est de savoir à quelle heure et à quelle intensité le ciel va nous tomber sur la tête, par Toutatis ! 

Déluge prévu pour ce 400, mais quand ?

À quel moment va-t-on se transformer en hommes et femmes grenouilles ?

Quand pourra-t-on chanter, il pleut, il mouille ...



Samedi 20 Mai, sur la ligne de départ


Dur, dur de mettre le cadran à 2h du mat, sans compter qu'il faut se coucher vers 20h la veille afin de mettre un peu de sommeil en banque !

400 bornes est une distance critique à négocier. On ne peut prévoir dormir à mi-parcours, quoique tout est possible avec les 27 heures de délai. En général, on roule la distance d'une seule traite, nous laissant éveillé presque 24 heures avant de replonger dans les bras de Morphée.

Mitch et Ralph sont aussi matinaux que moi

Comme c'est mon tour de distribuer les cartes de brevets, je dois être sur place un peu en avance, afin de rassembler le troupeau. Pour 4h15, je suis donc au stationnement incitatif de la gare de Vaudreuil-Dorion, après moults détours dus à de nombreux travaux sur les autoroutes métropolitaines. Ceci engendre d'ailleurs quelques retards pour les participants, arrivant en majorité à la bourre. 

Du retard à cause de la construction sur la 20 et la 40

Certains n'ont pas été pognés dans les labyrinthes routiers car ils sont venus à vélo de Montréal. Ce sont Carl, le missile du club, ainsi que Pierre, le breton, avec son vélo de gravel, qui veut se tester en rallongeant la sauce. Cela leur fera un beau 500 bornes dans les pattes !

Pierreau est venu de Montréal à vélo, chapeau !

Pour ne pas mettre trop de pression aux attardés, je prends la décision d'attendre que tout le monde se prépare avant de prendre le départ. C'est plus sympatoche de partir ensemble, même si on doit prendre 5 minutes de retard. Un brevet n'est pas une course, surtout sur une randonnée d'une vingtaine d'heures. 

Chacun se prépare au départ, David règle son disque

Côté météo, elle s'annonce comme prévue durant la semaine. Le vent devrait être un facteur négligeable mais la pluie sera bien présente, et en quantité s'il vous plait. La seule inconnue est de savoir quand on va la recevoir d'aplomb ! Les pronostics sont lancés. Selon Windy.com mon application préférée, ce serait vers les 11h-midi, à suivre !

Y a des maringouins ce matin, tout de jaune vêtus !

Sur les 22 inscrits, seulement deux riders ne se présentent pas à la feuille de pointage. Il s'agit de Jo, notre président, qui a mal dormi car ayant trop bouffé de pâtes la veille. Et l'ami Jocelyn, victime d'un bobo physique, qui a du renoncer pour aujourd'hui, ce n'est que partie remise.

Encore des attardés, dépêchez-vous Gilles et Régis, dit Gaby !

Tout le monde est enfin prêt, nous pouvons prendre la photo de groupe. Ça fait plaisir de voir tous ces sourires radieux. Partir au sec est déjà une victoire pour nos randonneurs motivés. 

Ave CVRQ !!! les Randonneurs qui vont s'en prendre plein la gueule vous saluent !

5h08, je déclenche mon Garmin. C'est parti pour 400 bornes de pur plaisir !



Étape 1, de Vaudreuil-Dorion à Alexandria, 81 km


Départ d'un gros groupe de quinze unités. Carl la Fléchette, nous dépasse en prenant une vidéo visible sur son compte Strava, cool ! Bye bye, l'éclaireur du club.

Quatre retardataires s'élancent quelques minutes plus tard, ce sont Jean, Martin D, Gilles et Régis, le frenchy de Toronto. 

La route pour débuter est agréable. Nous sommes déjà dans la nature à la différence d'un départ urbain ou on doit s'extraire de la banlieue pendant quelques kilomètres. La nature s'éveille en même temps que nous, peu de vent, ça papote dans la joie et la bonne humeur.  

Départ direct dans la campagne, génial !

Nous filons vers le St Laurent plein sud, que nous rejoignons au km 10. Puis Chemin du Fleuve direction ouest, on bifurque à droite plein nord au km 23. Faut bien regarder son GPS sinon gare aux erreurs.

On longe le fleuve sur le chemin du fleuve, étonnant !

Les attardés nous rejoignent, sauf Régis que nous ne verrons pas de la journée. Dommage l'ami de n'avoir pu re pédaler ensemble. Ce fut un plaisir lors d'un 200 des 2 Traverses, l'an passé.

Km 30, pause pipi en pleine pampa, que de pets ! Certains s'arrêtent, d'autres continuent, bref c'est la débandade. Le beau groupe est soudain éparpillé. Chacun doit sprinter pour recoller aux précédents.

Pause pipi en pleine pampa, que de P !

Nous rattrapons la 201. Grosse descente ou je frise les 65 km/h, vitesse maxi du jour. Grisés par l'allure, certains oublient de tourner  à gauche sur le chemin St Henri, Gaby en tête. Première erreur de navigation pour notre rouleur gaspésien, ce ne sera pas la dernière !

À l'assaut du massif de Rigaud en sous-bois

Le regroupement d'une douzaine de cyclos s'effectue dans la côte de l'érablière. Nous culminons à l'altitude suprême du brevet, soit 156 mètres. Wow, sortez les masques à oxygène ! 

Ravito sirop d'érable à l'érablière St Henri

J'en arrache un peu dans la côtelette avec mon vélo plus chargé que d'habitude. Avec la pluie et la nuit, il faut prévoir des couches supplémentaires pour être bien couvert et ne pas prendre froid. Il faut que je m'ajuste, ça ira mieux par la suite. 

Après le massif du mont Rigaud, cap au sud-ouest, vent de sud léger. Km 50, bonne route descendant en faux-plat sur quelques kilomètres. On déboule dans Très Saint Rédempteur, ce nom m'amuse toujours. 

Km 60, nous voilà en Ontario. Des relais s'organisent dans la plaine. Ce sont souvent les mêmes qui tirent le paquet. Les autres suivent comme des moutons, dont moi en passant. Mais j'ai l'excuse de prendre des photos, c'est pour cela que je reste à l'arrière ! Je dois aussi avouer que je suis une petite cylindrée, pas assez puissant pour emmener un peloton très longtemps, à 30 de moyenne, vent dans le pif.

Ben non, chus pas toujours derrière !

On retrouve à l'avant David, Martin H, les 2 Michel, Olivier, Sebastian, Philippe et la valeureuse Kathia, notre seule féminine de la gang. Celle-ci prend d'ailleurs un long relais d'une dizaine de kilomètres, sans que personne ne la dépasse, pour soulager son effort. 

Il y aurait bien des choses à revoir dans la conduite de notre peloton. Par exemple, fixer la durée et le passage des relais. Déterminer l'allure constante à établir, car le premier a souvent tendance à accélérer, en mode contre la montre. Enfin, le positionnement des cyclistes dans le groupe, savoir bien se placer en fonction du vent, pour bénéficier de l'abri de celui qui précède. Ceci en toute sécurité, en prévenant des autos surgissant de l'arrière. Bref, un cours de peloton 101 serait à proposer, comme le font certains clubs, comme Vélo Passion ou Maglia Rosa.

Une vingtaine de bornes sont écoulées ainsi. Nous arrivons au premier contrôle d'Alexandria du km 81, à l'Esso-County, il est 8h10, à 27 de moyenne, merci les locomotives.

Ontario, nous voici !

Pause sanitaire, pointage carte, boisson énergétique Gatorlyte dans la gourde, banane et sandwich tirés de la sacoche, faut se vider pour alléger le vélo ! 

Y a de la joie à Alexandria

Pour l'instant, le ciel gris retient sa pluie. Mais c'est pour quand le feu d'artifice ?

Ça va péter ! Mais quand ?



Étape 2, d'Alexandria à Winchester, 75 km, total 156 km


Onze minutes plus tard, c'est un nouveau départ d'une douzaines de riders. Il faut rouler sur cette route plate, quasi rectiligne et presque toujours dans la direction sud-ouest. 

Service pour l'Amoureux, intéressé Olive ?

Nous franchissons les 100 km alors que les nuages se font de plus en plus menaçants. On doit lutter contre un petit vent de sud qui a forci annonçant l'arrivée de la pluie. 

Cherchez l'intrus parmi les Schtroumpfs

Km 125, première ondée de la journée, ça ne dure pas. Certains s'arrêtent pour enfiler l'imperméable et autres protections, moi non. Le peloton se morcelle, perdant sa belle unité. Je fais une prière pour que les hostilités mouillées commencent seulement à partir du 2ème contrôle de Winchester. 

Dernière photo au sec !

Deux kilomètres avant le checkpoint du km 156, une belle averse se présente. Je me dépêche pour éviter d'être trop rincé. 

Ouf, arrêt au Tim, nous voilà au sec. Mais pas au chaud, la clim nous envoyant un petit air frisquet. On y retrouve quelques amis, dont Jean et Martin D, deux échappés du matin. 

Deux échappés du matin

Beaucoup de monde dans la file, heureusement je suis dans les premiers servis. Au dehors, c'est le déluge qui s'installe pour de longues heures. 

Ça y est, c'est le déluge !

Je me commande un sandwich irrésistible au bœuf, un café 1-1 avec un scone, genre étouffe-chrétien. Nous cassons la croute tous ensemble, certains se changent en homme grenouille et retournent affronter un univers aquatique. 

Mitch et Seb se régalent au Tim

Je vois arriver Gaby, Emmanuel et Kathia, je décide de les attendre pour rouler plus tranquillement. Le problème, c'est qu'ils commandent leur repas alors que j'ai terminé le mien. Moralité de l'histoire, ma pause va durer près d'une heure ! 

Mes nouveaux amis se restaurent encore, grouille avant qu'il mouille !

Le rapide Casey débarque à son tour, il a été victime d'une méchante crevaison, lui bousillant son pneu. Heureusement que Michel G lui a gentiment offert celui qu'il emporte en cas de problème de ce genre. Notre anglo a pu ainsi réparer et continuer son brevet. 

Mes acolytes ayant fini de se sustenter, nous nous rhabillons pour affronter des conditions équatoriales. Pour moi, ce sera sur-chaussures, coupe vent et protège pluie Goretex, rien sur mes jambes nues, il ne fait pas si froid. 

Nous repartons tels les quatre mousquetaires protégeant leur reine. Quatre crapauds et leur grenouille, croa, croa !!!



Étape 3, de Winchester à Ottawa, 63 km, total 219 km


C'est parti pour s'éclater dans les flaques d'eau. Autant se faire une raison, on va en avoir pour la journée. Les photos sur le vélo vont se faire rares, l'appareil étant bien rangé dans la poche arrière du maillot, avec l'imper par-dessus. Pas facile de le sortir de sa cache, c'est déjà une manœuvre assez dangereuse au sec. Alors sur route mouillée, je préfère tenir le guidon avec mes deux mains.

Nous empruntons à présent la route 43, assez passagère, mais dotée d'un bel accotement bien asphalté. Casey est le plus rapide de la bande, il se détache vite en avant. Gaby ne peut s'empêcher de lui coller aux basques, explosant notre petit groupe. Au bout de quelques kilomètres, notre gabspésien abandonne sa vaine poursuite, lui-même explosé. Il laisse filer notre anglo, disparaissant de notre champ de vision.

Km 174, nous quittons la grande route pour remonter plein nord vers Ottawa. La pluie tombe sans discontinuer, tantôt forte, tantôt faible. À la longue, on s'habitue. Ce soir, il va nous pousser des nageoires !

Km 182, nous longeons la rivière Rideau, nous la suivrons sur près de 50 kilomètres, jusqu'au centre ville de la capitale. De temps à autre, nous changeons de rive. 

Au km 192, j'avais spotté sur Google un restaurant panoramique avec des cygnes barbotant sur la rivière, Swan on the Rideau. Dans mes rêves, la belle boisson fraiche, bu sous un parasol, en regardant la marina de bateaux et les touristes en maillot !

Pour l'heure, c'est dans ma bulle ... d'eau que je pédale, en attendant que les kilomètres défilent rapidement. Jusqu'au prochain arrêt nous mettant au sec.

Puis le trafic routier s'intensifie sur la route 73. Je mène le quatuor à une allure relax, autour des 25 à l'heure, le vent nous poussant faiblement. Km 202 puis km 207, nous traversons le Rideau pour une énième fois.

À 500 mètres du 3ème contrôle, nous apercevons Olivier et Mitch sur la piste cyclable à proximité, vélo retourné, en train de réparer un flat. Ce n'est vraiment pas de chance.

Km 219, nous garons les bécyks devant un McDo de la banlieue, il est 14h30. La pause originale devait se faire en plein centre ville, proche du Parlement. Mais après consultation des Randonneurs Ontario et de quelques personnes connaissant la place, il nous a été fortement recommandé d'éviter les endroits trop touristiques, et mal famés. Est-ce qu'Ottawa serait en train de devenir le Chicago des années 1930 ?

McDo, toujours une valeur sûre pour Gaby

Regroupement général au royaume de Ronald. Kathia voulait aller au Farmer's Pick, considéré plus santé, elle ne semble pas apprécier les fast foods. 

Casey, notre anglo unlucky, mieux vaut en rire !

Pour la majorité d'entre nous, c'est ration de burgers, frites et coke. Il est important de remettre du fuel dans le réservoir. Chacun se refait une santé. On profite aussi d'être à l'abri pour une séance de déshabillage rhabillage. Cependant, avec l'effet de la clim, je me gèle les os. Dehors, l'humidité moite est plus supportable. 

Séance déshabillage pour Michel

Trente minutes plus tard, un groupe de onze cyclos se recompose pour repartir ensemble. On retrouve les 2 Michel, Olivier, Ralph, Loïc, Gaby, Kathia, Emmanuel, Philippe, Casey et moi-même. 

Tant qu'à être mouillés, on va prendre la pose !

Au moment de reclipper, Pierre apparait dans le décor. Le pauvre roule seul depuis ce matin mais cela ne semble pas le déranger. Il a toujours un métro de retard et cela va se répéter jusqu'à l'arrivée.

Toujours un métro de retard pour Pierre



Étape 4, d'Ottawa à Papineauville, 77 km, total 296 km


La bande de randonneurs repart pour une dizaine de bornes sur les pistes cyclables d'Ottawa, traversant des parcs, longeant le canal Rideau. Gaby est notre cher leader, il a vécu dans cette ville pendant deux ans, il se sent comme chez lui. 

L'avantage du temps pourri, c'est que nous croisons très peu de promeneurs, nous laissant libre de circuler sur la piste. Un samedi par beau temps, ce serait inondé ... de monde. 

Ralph est la nouvelle victime d'un flat à la roue avant. Olivier s'arrête pour l'aider à réparer, belle solidarité. Nous ne les reverrons plus du brevet. 

Olive et Ralph après leur crevaison

C'est le festival de la crevaison aujourd'hui. Chacun prie pour passer entre les gouttes de la malchance, à défaut d'éviter celles de la pluie. Surtout que mes pneumatiques sont un pneu usés. C'est déjà bien chiant de réparer un flat, mais en plus sous la flotte, ce serait le summum de la détresse. 

Nous parcourons le downtown d'Ottawa par Metcalfe street pour rejoindre Wellington et la plaine du Parlement. 

Des voix sorties de haut-parleurs nous accueillent, il y a souvent des manifestations à cet endroit stratégique du Canada. 

Y a toujours de l'animation à Ottawa, même un jour de pluie

Pour nous, ce sera juste un shooting de band, nine men and woman, riding in the rain !

9 randonneurs in the rain

Bye Bye Otta...wet !!! 

Martin Bolt in Ottawa

Casey, notre english spoken rider, prend le lead. Gaby le follow, tel un poisson pilote en milieu humide. 

Nous quittons enfin la capitale fédérale. Ces grandes villes sont idéales pour le tourisme mais moins super à traverser pour les brevets. Cela fait baisser la moyenne, quoiqu'on s'en fout, puisque ce n'est pas une course !

Direction Est sur Sir George-Étienne Cartier parkway, nous rentrons au bercail, c'est bon pour le moral. Les deux échappés sont rejoints par Loïc et Emmanuel, les frenchies aux fourmis dans les jambes. Je mène le reste de la troupe à un tempo plus relax.

Km 238, la route est fermée pour les autos, mais pas pour les vélos. Youpi !

Km 245, le quatuor de tête nous induit en erreur de navigation, Gaby est encore le responsable, grrrr ! Il fallait bifurquer à gauche et attraper la belle piste cyclable tournicotant, longeant the Ottawa River. 

Le niveau de l'eau est encore très haut, elle affleure la piste, heureusement légèrement surélevée. Aux alentours, tout est inondé. 

Km 254, nous débouchons sur la grosse route 174 en travaux, bordée d'un bon accotement, fort heureusement. Nous arrivons au traversier Bourbonnais, une chance qu'il soit opérationnel, le club a pris soin de vérifier. Une semaine plus tôt, ça ne passait pas. 

Dépêche Mitch, le traversier accoste

Regroupement des effectifs, Gaby, Loïc, Philippe, Emmanuel, les 2 Michel, Kathia et moi.  Casey s'est enfuit, prenant le bateau précédent. Nous embarquons sur la navette, je paye la note pour les huit rescapés de notre gruppetto, cadeau du CVRQ. C'est l'avantage de rouler avec un membre du polit bureau, de surcroit avec le trésorier, certainement le plus corrompu ! À 2$ fois 8 personnes, ça ne devrait pas ruiner le club.

Gaby prêt pour une belle croisière touristique

La traversée n'est malheureusement pas très touristique. Avec les embruns du large, nous sommes en transit, et transis sur le pont. Je m'affaire à me sustenter puis à tenter de recharger la batterie de mon GPS qui n'est plus qu'à 22%. Tiendra-t-il jusqu'au prochain checkpoint ? 

Nous accostons à Masson-Angers, on y retrouve la 148 et le Québec, bienvenue chez les chtis mouillés ! Nous resterons sur cette route pour les 70 prochains kilomètres. Bon accotement, malheureusement plein de craques, on regrette presque l'Ontario !

Encore une trentaine de bornes avant de mettre nos os au sec, les ondées continuent de se déverser. Le groupe de 8 se scinde encore, Gaby, Emmanuel, Loic, Philippe et moi, suivis par les 2 Michel qui assistent Kathia, roulant à un rythme plus pépère.

Thurso, Plaisance puis Papineauville au km 296, 4ème contrôle, il est 18h30. Un dilemme se présente, va-t-on au McDo ou au Tim ? C'est l'enseigne canayenne qui l'emporte aux suffrages, histoire d'alterner les burk foods. En plus, il y a de la soupe chaude !

Premier entré, premier servi, il n'y aura que Gaby qui aura droit à un breuvage réconfortant. Pour les autres, ce sera café, coke, sandwiches, patates et autres sucreries. 

Pas un chat dans le restau, nous nous installons sur la grande table centrale. L'ambiance est tout de même au beau fixe, malgré ce temps pourri, à ne pas mettre un chat dehors, ceci expliquant cela. Nous avons tous le même objectif, en finir avec ce terrible brevet noyé dans l'humidité permanente.

Belle tablée de randonneurs contents d'être las et trempés

Je profite de la pause pour enfin recharger GPS et écouteurs sur ma batterie USB. Loïc prend des notes sur mon équipement. Je ne peux lui offrir une plug pour son cell, je n'ai que deux entrées possibles. 

Casey nous rejoint quinze minutes plus tard, il a écopé d'un autre flat, not lucky notre anglo !

Même Kathia apprécie la chaleur de l'ambiance

Après 40 minutes de relaxation, tout le monde se remet en condition pour attaquer la nuit. Celle-ci devrait nous envelopper de son noir manteau pour les 100 dernières bornes. 

Pierre fait à nouveau son apparition alors que nous sommes sur le point de décoller. Coucou l'ami, et RV au prochain contrôle, dans 41 bornes. 



Étape 5, de Papineauville à Hawkesbury, 41 km, total 337 km


Départ en fou pour certains, Casey en tête, le plus véloce d'entre nous. Gaby et Loïc accélèrent pour lui coller au train. Les cinq autres forment le traditionnel gruppetto.

Après Montebello, km 305, nous serrons les dents en prenant une averse encore plus forte que les autres. Plus rien ne peut nous arrêter, nous sommes aussi à l'aise que des poissons dans l'eau. 

Km 316, nous apercevons les lumières rouges de deux cyclos à l'arrêt. Ce sont Loïc et Gaby s'entraidant pour réparer une crevaison, une de plus, quelle hécatombe !

Les 2 Michel prennent des relais à allure régulière. Quand Emmanuel passe devant pour tirer à son tour, nous devons le rappeler à l'ordre. Hey mon Manu, prendre un relais, ce n'est pas piquer un sprint ou appuyer à fond sur les pédales. C'est adopter une vitesse adéquate pour que les copains derrière se reposent. 

Km 328, nous évitons le shortcut de Calumet pour rester sur la 148, ayant un meilleur revêtement. L'obscurité s'installe progressivement. J'allume ma loupiote avant, celle derrière fonctionne depuis un moment. Et pas en mode clignotant, svp, ça fait mal aux yeux des suiveux !

À Greenville, nous quittons la 148 pour nous balader dans les rues du village. C'est agréable car ça redescend sur la rivière des Outaouais. Nous revoici en Ontario en franchissant la côtelette du large et long pont d'un kilomètre. 

Km 337, coucou Hawkesbury, 5ème checkpoint localisé au Gas King, il est 21h. 

L'endroit est ouvert 24-7 et il pue la cigarette. Le drôle de gérant de la boutique ne veut pas signer nos bouts de carton détrempés. D'ailleurs, on se demande s'il sait écrire, le bougre.

C'est quoi ce dépanneur qui pue la cigarette ?

Je fais donc office de bureau de contrôle, comme au PBP, attablé sur une chaise bancale dans la shop. Nous nous amusons de cet instant insolite. Mitch me prend en photo mais elle sera floue, ma caméra embuée, commençant à souffrir des intempéries. Vraiment pas terrible comme point de rassemblement, mais au moins, on est au sec. 

Je boulote un sandwich fatigué lui aussi, sorti de la sacoche. Je sirote un coke, histoire de me remettre un peu de sucre dans le corps. Ce n'est pas vraiment pour me déshydrater, avec tout l'eau qu'on se prend sur la gueule depuis presque 200 kms. 

On fait la file devant le contrôleur du brevet

Vingt cinq minutes plus tard, on repart sous la pluie et dans la nuit noire. Je grelote !



Étape 6, de Hawkesbury à Vaudreuil-Dorion, 65 km, total 402 km


Huit desperados reprennent la route sur leur monture. Nos lumières éclairent les flaques d'eau, en essayant d'éviter les trous qui s'y cachent. Tout le monde est motivé pour cette ultime étape. Quelques uns montent le tempo et s'échappent par l'avant. Pas envie de m'exciter le pompon, je reste à mon rythme. 

Km 346, bifurcation à droite, ceux devant dont Gaby, encore lui, ont continué tout droit. Certains rebroussent chemin, notre gaspésien insiste et se fourvoie royalement. Résultat, 4 km de rallonge, on ne le reverra pas jusqu'à l'arrivée. 

Après cette nouvelle erreur de navigation, me revoici devant à conduire le troupeau. Par une voie de service, nous longeons la 417 Transcanadienne. 

Et puis, miracle, la pluie s'arrête ! Nos visages ne sont plus fouettés par les gouttes d'eau. Malgré la noirceur, nous apercevons le ciel qui se dégage. Va-t-on terminer au sec ?

À St Eugène, c'est à nouveau la débandade. Les deux Michel, Emmanuel, Loïc et Philippe prennent le large. Il ne reste que Kathia pour m'accompagner, nous n'avons pas le gout d'accrocher les wagons. Nous pédalons tranquille à notre tempo, doucement mais sûrement. 

Je m'arrête sous un lampadaire pour changer ma batterie de lumière. Ma partenaire m'attend gentiment, nous terminerons ensemble le brevet.

Km 374, voici Rigaud tout éclairé, sans âme qui vive, dans cette ville déjà endormie. Aux alentours de 23h, tous les commerces sont évidemment fermés, même pas un Tim d'ouvert. 

On sort du bled, l'air est doux, la balade est redevenue agréable. Ça sent la fin des haricots, on savoure les derniers kilomètres de cette longue expédition. Plus tellement envie de manger ou de boire, pourtant il le faut, pour ne pas tomber en panne sèche. 

Pour passer le temps, on papote. Kathia me parle de sa job, la neuropsychologie, c'est ben intéressant. À propos de neurones, je lui raconte l'histoire de ma crampe au cerveau, c'est à dire de mon AVC contracté en 2002. Cette loterie de la nature m'a rendu hémiplégique côté droit pendant 6 mois. Par chance, la plasticité neuronale a permis de reconnecter la matière grise aux muscles, me rendant ainsi la mobilité. 

Alors que ma forme physique revenait peu à peu, je décidais en 2012 de m'attaquer au défi du PBP. Et me revoici sur un vélo depuis ce temps. Kathia est impressionnée par ma volonté et ma pugnacité.

Nous traversons Hudson, bordé de belles et grosses cabanes toutes illuminées. Ça a l'air bien chicos par icitte ! Je connais cette route de jour. Elle était pourtant bien maganée mais l'asphalte a été récemment refait, c'est le pied de rouler dessus. 

Malheureusement, à partir du traversier vers Oka, les craques reprennent le dessus, finie la rénovation. Il faut zigzaguer sur la largeur de la route pour ne pas s'enfarger dans les cratères. Quelques rares autos nous dépassent, on se range sur le côté.

Km 398, nous retrouvons la civilisation et les lumières de Vaudreuil-Dorion. Je m'interroge toujours à propos de cette grande tour carré qui ne sert à rien, visible à des lieues à la ronde. 

À un feu de circulation, nous retrouvons Loïc et Philippe qui semblent égarés et cherchent leur chemin. Ils emboitent nos roues, nous terminons par la piste cyclable jusqu'au parking de la gare. Dans les derniers hectomètres, Philippe disparait des rétroviseurs, victime d'un flat à son tour ! Quelle belle journée pour les crevaisons !

J'arrête mon GPS, 402 bornes au compteur, il est minuit et 19 minutes, soit 19h19 pour boucler le brevet, j'aime ce nombre. Wow, c'est mon meilleur temps sur la distance. Faut dire que les éditions précédentes étaient plus vallonées. 

Gabriel arrivent quinze minutes plus tard, après sa énième erreur de parcours. Un cours GPS 101 s'impose dans le cadre des webinaires du CVRQ cet hiver. N'hésitez pas à y participer pour éviter de rouler des kilomètres supplémentaires. 

Notre gruppetto heureux d'en finir à l'arrivée

Les deux Michel et Emmanuel, arrivés depuis une vingtaine de minutes, terminent de ranger leur matose. Bye bye les amis, à bientôt, pour de nouvelles aventures.



Épilogue


Bilan de cette journée pluvieuse que jamais, de ce brevet rebaptisé sans contredit : 

400 Otta-wet !!!

Belle solidarité dans les groupes de même niveau. Beaucoup de crevaisons. Heureusement, aucun incident à déclarer. Nous avons eu de la chance dans notre malheur. 

Kathia, comme pas mal d'entre nous, est bien contente de remettre des habits secs sur sa peau, au chaud dans son auto. Chacun ré harnache son fidèle destrier sur ou dans son véhicule. Puis dispersion aux quatre coins de Montréal. 

J'aperçois Philippe, de retour après sa réparation de crevaison et le pointage effectué au Couche Tard à 500 mètres de là. Celui-ci était facultatif puisqu'on avait déjà bouclé les 400 bornes, en arrivant au stationnement. 

On se salue en se disant à la prochaine. Lui doit encore faire la route jusque Sherbrooke, c'est un courageux randonneur.

À la prochaine, sous de meilleurs auspices. 

Ce fut vraiment un brevet d'anthologie !

Jamais autant roulé sous la flotte.

Après cette épreuve dantesque, le prochain 400 nocturne dans 2 semaines et le 600 dans 3 semaines, ne devraient être qu'une formalité. 

Plus qu'un brevet pour le sésame du PBP 2023.

Liberté et Solidarité !

Vive le CVRQ !


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