samedi 27 mai 2017

300 bornes dont 150 avec un genou en compote

L'acteur principal de la journée
 
Après l'échec de mon dernier 300, commencé mais terminé en brevet de 150, j'ai des comptes à rendre avec moi-même. La pilule a été dure à avaler. Je décide donc de m'inscrire pour le prochain 300, histoire de remonter mon estime personnelle. Ce sera aussi un test pour mon Piuma sur une plus longue distance, notamment pour peaufiner ma position et améliorer mon rendement sur un tel bolide. Ultime check de la météo deux jours avant le rendez-vous, celle-ci passe le test. J'envoie mon inscription à Jean, nous sommes 6 inscrits sur le site du CVRM. 

A l'aube du samedi 27 Mai, je quitte mon condo et pédale pour le lieu de départ. Je suis faiblement chargé, pas de sacoche Arkel, juste un sac de selle extensible qui contient mon kit de dépannage, diverses crèmes et quelques bricoles à grignoter. J'ai aussi mon petit sac de tube horizontal qui contient mon tableau de marche sur le dessus, mes blocs d'alimentation pour mes recharges en électricité ainsi que quelques denrées énergétiques. L'objectif du jour est d'abord d'aller au bout, ensuite d'essayer de foncer pour faire un bon temps, enfin de tenter de battre mon record de 14h09 établi en 2015, lors de la préparation du PBP. 

Jean et Fred sont déjà stationnés, discussion amicale avec notre fusée champenoise de service. Lui aussi voudrait faire une performance sur ce brevet, les conditions météo étant effectivement idéales. Après tout, qu'est-ce que 300 bornes quand on sait qu'une certaine Jessica Belisle a effectué environ cette distance pendant 10 jours consécutifs lors de son Tour du Québec. Nous autre, on serait bien capable de le faire juste une fois, que je souffle à super Perman, mon demi-belge préféré. Michel Lemaire et Martin Dugré finissent de préparer leur matose, nous serons 5 participants au lieu des 6 prévus, Yvon Clément ayant préféré rester sous la couette, le chanceux. Pour 6h, chacun sort son plus beau sourire et c'est parti pour une belle journée de plaisir. 

Bibi, Martin, Michel, Fred et Jean derrière le kodak (photo CVRM)

1- De St-Lambert à St-Césaire, 54 bornes. 

Fred s'élance sans attendre, parti encore une fois pour la postérité, battra-t-il son record, réponse dans une dizaine d'heures, temps à battre 10h20, Go Freddy Go ! Martin n'est pas encore prêt au coup de starter, Jean le bon samaritain attend son copain. Nous partons à deux avec Michel, un nouveau venu au club. Je m'arrête sur Lapinière pour mettre en marche le tracker sur mon cell, comme cela ma chérie pourra suivre ma progression et venir me rejoindre si ça lui tente. 

Je fais connaissance avec mon compagnon d'aventure, sûrement qu'on passera une partie de la journée ensemble. Michel en est à son premier brevet de 300, il est un peu anxieux. Âgé de 58 ans, il a été victime de problèmes cardiaques il y a quelques années, il s'est donc mis au vélo pour la première fois de sa vie, d'abord pour se remettre en santé puis pour se lancer de nouveaux défis. Tiens donc, ça me rappelle certaines personnes du club qui ont aussi choisi le vélo pour se donner d'autres chances de bouffer la vie à pleine dent. Pour compléter le portrait, il chevauche un Specialized Tarmac carbone, roues a boyaux, il fait partie du club Vélo Passion et son objectif serait de participer au PBP 2019 en effectuant les brevets qualificatifs. Je le trouve très en shape, la mission est déjà à moitié accomplie. 

Nous roulons aisément sur une base de 26 sans forcer. La température n'est pas trop fraiche ce matin, je suis habillé en cuissard court mais un justaucorps sous le maillot n'est pas de trop. Les conditions sont super pour cycler, vent faible moins de 10 km/h à dominance ouest, ciel voilé qui passera à bleu en journée et une température maxi de 24 degrés, merci pour ce bulletin météo. J'ai remonté ma selle en début de semaine, me trouvant trop bas. J'espère que cette nouvelle position améliorera mon rendement, c'est ce qu'on verra par la suite. 

On enchaîne les relais, l'entente est bonne. Voilà Chambly, on papote encore quand les conditions le permettent. Un bout sur la 104, un autre bout dans la campagne proche d'un golf et St-Césaire est atteint à 8h10, mon tableau de marche est respecté. Je voudrais limiter les arrêts au minimum car c'est en partie de cette manière qu'on peut gagner sur le temps écoulé. Jean et Martin arrivent peu après nous, ça marche bien votre affaire nous dit Jean, gracias lui réponds-je. Pointage, pipi, grignotage et on remet en route. 

Michel, la nouvelle recrue

Jean, bouffeur de muffin

Mon nouveau compagnon d'aventures

2- De St-Césaire à Lac-Brôme, 61 bornes. 

Je repars avec mon nouvel équipier, les 2 autres prolongent leur pause, vous nous rattraperez, leur dis-je. On enchaîne par la piste cyclable, le contexte est agréable, la verdure est revenue dans le paysage, ça sent les beaux jours, on apprécie le moment. En approchant de Granby, sur les petits faux plats insignifiants, je ressens par court instant, de drôles de sensations dans le genou gauche, bizarre, bizarre, néanmoins à suivre. Nous dépassons le lac Boivin, km 80, pas de halte, les jambes sont correctes. Je me remémore le dernier 300, assis à l'abri du vélogare et dégoûté par une énième averse. J'avais renoncé là par manque de motivation évidente. Cette fois-ci, j'ai passé le cap, je suis motivé et ça va être une belle journée. 

Un peu de 112 et hop à droite, on grimpouille par le chemin Saxby en direction de Bromont. Je demande à Michel s'il est bon dans les côtes, il me répond que c'est pas son point fort, cool, moi non plus. En fait, tous mes points ne sont pas forts. Sans trop forcer, on passe les côtelettes du chemin Brôme. Mes mauvaises sensations sont toujours présentes mais c'est supportable, ça va passer que je me dis. On redescend sur la 104 partiellement repavée, excellente initiative, on peut même rouler en sécurité sur la très petite bande cyclable. 

Voilà déjà l'IGA du 2éme contrôle au km 115. Il est 11h, toujours dans les temps prévus, 20 minutes d'arrêt. Le duo Jean-Martin nous rejoint alors que nous sommes attablés à dévorer notre pitance, sandwich au jambon, salade de crevettes, jello comme dessert, pas de liquide, mes gourdasses sont encore bien remplies. Texto à ma chérie qui me suit et m'encourage à distance, je lui dis que ça ne va pas trop mal pour l'instant. Intermède sanitaire and it's time to go pour notre duo qui reclippe pour la suite de notre aventure. 

Carbone et Titane

Petit rictus joyeux ?

Pause ravito à Lac-Brôme

3- De Lac-Brôme à Sutton, 63 bornes. 

Nous attaquons la boucle du mont Sutton, ça commence par l'abominable 243, toujours pas refaite depuis le temps que je l'emprunte. Les relais se succèdent sur cette route passagère, ça file bon train malgré les faux plats et les bosselettes nous conduisant à Mansonville. Je propose le court arrêt facultatif au dépanneur, Michel acquiesce volontiers, un peu de boisson fraîche ne fait jamais de mal. Jean et Martin étaient sur nos talons, ils stoppent aussi, passage aux puits pour Jeannot. Ils repartent devant, nous leur emboîtons le pas 2 minutes après mais nous n'effectuons pas la jonction. 

Voici à présent la vallée de la Missisquoi parsemée de petits raidillons, la douleur au genou se réveille soudainement, ça commence à tirer méchamment sur mon tendon. Oups, je n'avais pas prévu ce scénario car je n'ai jamais eu de problème avec mes articulations. Il reste la moitié de la distance à parcourir m'indique mon GPS, soit 150 bornes, la situation est grave mais pas désespérée. Cependant, la redoutable Scénic approche bientôt et il va falloir négocier avec mon handicap. Je laisse filer Mitch devant et décide de ménager mon côté gauche, c'est le droit qui devra fournir plus d'énergie. Qui va piano va sano, doucement mais sûrement, je franchis l'obstacle, mes pulsations sont bien tranquilles car il fallait réduire la puissance des bielles du moteur. Ce n'est pas encore ce coup-ci que je pulvériserai mon record personnel sur la Scénic. 

En haut de la côte, je ne retrouve pas mon acolyte, je crains qu'il ait pris à droite, la route directe indiquant Sutton 7 km, évitant ainsi le passage par Abercorn. C'est effectivement ce qui se passe, malgré les remontrances de son Garmin 800 lui indiquant Hors Parcours, il a continué dans la mauvaise direction. Je redescends donc solo sur Abercorn puis remonte plein nord vers le 3éme checkpoint de Sutton, km 180. Le vent est sensiblement défavorable, ce que n'apprécie pas mon genou, ça me fait vraiment chier, vivement la pause. 

Pour 14h, j'atteins l'IGA ou Michel est déjà là depuis un bon quart d'heure, avec 5 km de moins au compteur mais quelques bosses en plus. Jean et Martin sont aussi arrivés et font un long arrêt au Subway, nous le saurons par la suite et repartirons avant eux. Pour le moment, halte gastronomique, mon compagnon de fortune m'attend pour reprendre ensemble, c'est sympa. Faut dire qu'il se sent peut-être plus rassuré d'avoir un guide ayant fait le parcours plus d'une dizaine de fois. Au menu, taboulé, petite assiette dégustation composée de raisin, fromage, crackers, noix, le tout arrosé d'un coke. Ça aurait pris plutôt une petite coupe de vino mais bon. J'essaye d'éviter les boissons sucrées qui taxent trop l'organisme en glucose mais de temps en temps ça donne un boost. 

J'informe ma chérie de mon problème de guibole, elle me répond que je peux toujours prendre le bus à Granby. No way, je veux terminer ce maudit 300, dussé-je terminer sur les rotules et y passer la nuit. Je profite aussi de l'arrêt pour comprendre d’où viennent mes ennuis. Peut-être que ma jambe est trop en extension, aussi je redescends ma selle dans son ancienne position. Mais le mal est fait. Peut-être que c'est la faute de ma selle qui s'est encore déformée, trop à gauche, ce sont les bons et les mauvais côtés des selles Brooks, faudra que j'étudie ça par la suite. 

4- De Sutton à St-Césaire, 86 bornes. 

J'ai déjà du mal à remettre ma cale en partant, ça commence bien. Je sens cependant que la pause a été bénéfique car la douleur semble moins forte qu'il y a 30 minutes. Nous remontons par la 215 Nord jusqu'à la 104. Les faux plats jusque Cowansville réveille la blessure, Michel étant au courant de mon handicap, il ajuste sa vitesse en fonction de la mienne, c'est bien gentil de sa part. 

Mon autre arrêt facultatif à l'Ultramar de Dunham au km 212 s'impose obligatoirement, histoire de soulager ce fichu tendon car c'est de pire en pire. Jean et Martin, que l'on pensait devant, nous rejoignent, quelle belle surprise. On grignote, on jase en se désaltérant, je les informe que ça va être dur de terminer les 100 dernières bornes, et que ce n'est pas la peine de m'attendre. 

On repart pourtant à 4, j'essaie de suivre comme je peux. Doucement, le rythme s'élève à 30 de moyenne. Comme le vent est légèrement défavorable, je me dis que c'est mieux de serrer les dents et de m'accrocher au train plutôt que d'en chier seul. C'est aussi meilleur pour le moral. Je réfléchis qu'il me faut un analgésique pour endormir mon mal, malheureusement personne n'en a dans notre gruppetto. J'en avais pourtant préparé dans mon kit de survie mais il est resté dans ma sacoche Arkel, grrrrr. Il me faudra attendre un dépanneur, le prochain est à Farnham, juste à côté du Tim. 

Cette idée de soulagement prochain m'incite à aller au bout de ma torture et à coller la roue de Jean. Celui-ci m'y encourage et j'apprécie son intention. La moyenne ne fléchit pas jusque Farnham, km 243, ça fonce. Voilà le dép salvateur et ses Tylénol extra fort, allez hop, 2 dans le gosier et attendons les effets. On profite de cette halte inopinée pour se sustenter. St-Césaire n'est qu'à 16 km, on décide de faire juste un stop and go à cet avant dernier contrôle. 

Ça repart toujours aussi vite, les médocs commencent à agir, je me sens mieux jusqu'au checkpoint, atteint vers 18h15, c'est encore très bon dans mon plan de marche. Comme prévu, nous prenons une courte pause à l'Ultramar de St-Césaire, dans l'agréable tiédeur de cette fin de journée. 

Prise de dope à Farnham

3 Piuma Ti au repos

Courte halte à St-Césaire

5- De St-Césaire à St-Lambert, 45 bornes. 

On rembraye à fond la caisse sur la 112, c'est Mitch qui prend un relais pendant 10 km, elle est bonne notre nouvelle recrue. L'allure est toujours élevée à mon goût, frisant le 32 à l'heure. Martin assure le relais suivant, je suis en 2éme roue. Mais à ce rythme et à force de tirer comme un damné, ma souffrance se réveille. Il faut que j'arrête pour prendre une autre dose d'anti-inflammatoire. Mais après absorption, rien n'y fait. Tant pis, je devrais serrer les dents jusqu'au bout. 

Jean nous fait découvrir une autre route de retour à partir de Chambly, par la piste cyclable de la forêt puis en coupant à travers Brossard pour rejoindre Grande Allée. Je suis perdu dans ces quartiers même si j'habite pas loin d'ici. Le jour décline gentiment tandis que nous flânons sur Lapinière puis Victoria. Enfin voici le contrôle ultime et la fin de mon calvaire. 

Il est 20h22 lorsque nous pointons dans le dépanneur Bon Coin, soit 14h22 pour 314 kilomètres au compteur avec une moyenne de 26. Wow, à 13 minutes de mon record perso et presque synchro avec mon tableau de marche. Je dois évidemment cette performance à mes remorqueurs, mes 3 compagnons de brevet qui m'ont offert une belle assistance pendant ces 100 derniers kilomètres. Je dois bien avouer que je me voyais abandonner ce foutu 300 mais la nature humaine est quand même source de résistance insoupçonnée. 

Selfie de nos 4 faces de fin de brevet, congratulations et dislocation. Michel est bien content pour son premier 300, je pense qu'il a de belles ressources pour devenir un super randonneur de longue distance. Il a juste à travailler son mental car c'est la clé dans ces épreuves d'ultra-endurance. Et aussi à améliorer la lecture de son GPS. 

Ouf, on est arrivé !

4 belles faces de vainqueur

Autre satisfaction de la journée, c'est le nouveau meilleur temps du CVRM pour l'ami Fred, 10h19 soit une minute de moins que la précédente marque, bravo à lui. 

Fred raconte son exploit:
Une belle victoire pour moi aujourd'hui....
Toujours bon de performer dans son sport surtout lorsque l'on revient de blessures comme moi. Aujourd'hui avait lieu un brevet cycliste de 300km sur la rive sud de Montréal et.... j'ai battu le record du club détenu par moi-même et Claude Binchet le 20 juin 2013. Battu d'une minute en 10 heures et 19 minutes mais au contraire de 2013 ou nous avions fini tous les deux et ou nous avions reçu l'aide de 5 autres cyclistes une partie du parcours, là j'ai tout fait tout seul 32.1 km par heure, avec un parcours en Estrie donc avec des côtes... de bonne augure pour mes objectifs en juillet et août....

Il ne me reste plus qu'à remettre d'aplomb mon genou sérieusement magané et à régler intelligemment ma position sur ce nouveau vélo. Car le prochain défi cycliste se profile déjà la semaine prochaine, le 50 km du Tour de l’île de Montréal avec mon fiston de 11 ans !!! 

Mon brevet de 300 sur Strava avec une bonne vingtaine de PR sur ce parcours maintes fois parcouru.

samedi 6 mai 2017

300 km + pluie + vent + 0 motivation + 1 flat = 150 km !

Toute la semaine, le sujet principal de discussion a été la météo. Et plus particulièrement celle de samedi quand va se dérouler le 3ème opus de la saga des brevets, le 300 bornes. Faut dire que ces derniers jours au Québec, les inondations dues aux pluies diluviennes ont pris une place importante dans les journaux d'informations, on n'avait pas vu ça depuis 40 ans. Bref, les prévisions ne sont pas engageantes, beaucoup d'eau et de vent au menu à cause de cette foutue dépression venue des États Unis et je ne parle pas de Trump. La question existentielle était à nouveau de sortie, j'y vais ou j'y vais pas ? Le vendredi soir, dernier examen de Météomerdia, on peut passer à travers si nous avons de la chance. Aussi pour moi, c'est un Go !

Jour J, 4h45, je me pointe sur la ligne de départ. Nous sommes une douzaine de breveteux aguerris prêts à relever le défi des 300. Fred se prépare à l'arrière de son char, on discute un peu. Je me surprends à lui confier un ressentiment provenant certainement de mon subconscient. Les brevets commencent à me tanner pour plusieurs raisons. D'abord les parcours du club sont toujours les mêmes, quoiqu'une lueur d'espoir est apparue avec la légère modification du 200. Ensuite le stress que ça provoque en moi quelques jours auparavant, la pensée de rouler par tous les temps, y compris la nuit, je n'y trouve plus de plaisirs dernièrement. Après avoir réalisé 9 brevets pop, 14 brevets de 200, 9 brevets de 300, 5 brevets de 400 dont un abandon, 5 brevets de 600 dont un abandon programmé et enfin un PBP réussi en 2015, je pense que je n'ai plus rien à prouver, surtout à moi-même. En fait, ce qui m'encourage cette année à y participer, c'est le plaisir de conduire mon nouveau bécyk Piuma récemment acheté et le désir d'améliorer mes temps sur les différents parcours. Il faut bien se donner de nouveaux défis, sacrebleu. 

Ceci étant dit, le départ est donné à 6h03, personne n'a l'air pressé de partir. Ça commence plutôt bien car malgré un ciel menaçant, nous pédalons au sec. Je roule avec ma gang de cyclos assidus des derniers brevets, Ralph, Olivier C, Marc, Yvon, Martin L et Martin D, deux nouveaux se sont joints à nous, Carl et Jonathan. Fred a deja lâché les chevaux. Quant à Jean, Gilles et Simon, ils ferment la marche. 

Les 11 braves du 300 + 2 manquants (Photo CVRM)

Dès les premiers coups de pédale, je sens que ça ne va pas bien. J'ai du mal à suivre mes compagnons, mes pulsations sont anormalement élevées. Certes nous roulons entre 28 et 30 à l'heure avec un vent défavorable venant de l'est mais il n'a pas l'air si fort. Serait-ce dû à ma sacoche et son rack Arkel récemment installé après ma selle, le tout devant peser entre 3 et 4 kilos ? Est-ce dû à un mauvais entraînement cette semaine, trop ou pas assez, je n'aurai pas récupéré assez de force ? Ou est-ce mon organisme qui est affaibli à cause de je ne sais quoi, handicap physique ou psychologique ? 

Toujours est-il qu'après 20 bornes dans les roues, moyenne de 27 ;-), je me fais larguer à la régulière dans un faux plat longeant la 10. Me voilà seul, face au vent. Pourtant il me faut baisser le rythme cardiaque parce qu'il y a encore 290 kms à parcourir. Comme pour arranger les choses, il se met aussitôt à pleuvoir avec pas mal de nuages gris a l'horizon annonçant un futur immédiat relativement humide. Sur le boulevard industriel ramenant à Chambly, je m'arrête pour pisser, Jean me dépasse sans me voir. 

En rattrapant la 112, j'aperçois des cyclos pas très loin, sûrement le regroupement de Carl, Jonathan et Jean, mais impossible de hausser le rythme pour les rejoindre. Ça ne tourne pas rond dans mes jambes et dans ma tête, je commence à gamberger. Le constat est simple, qu'est-ce que je fous là, je n'ai pas de plaisir ! 

A Marieville, km 39, je dépasse Marc qui répare un flat, accompagné de Ralph et Martin L qui l'attendent. Pas envie de m'arrêter, je vais prendre un peu d'avance. Dix minutes plus tard, ils me rejoignent avec Gilles et me larguent sans un mot. Nouveau coup au moral. Je rallie St Césaire en négociant avec le vent, ma modeste moyenne de 25 prévue aujourd'hui sur mon tableau de marche, fond comme neige à soleil, je suis présentement à 24. 

Au contrôle, km 54, regroupement de la plupart des cyclos, cela me ragaillardit, je ne suis pas si nul que ça. Check rapide, je m'enfile banane et chocolat, je repars sans m'attarder. Il doit rester 5 ou 6 cyclos après moi, ça me rassure de ne pas être le dernier. 

Un peu reboosté, j'essaie de me motiver pour la suite, je rejoins la piste cyclable menant à Granby. La plupart de mes compères prennent cette route bien que ce ne soit pas le parcours officiel du CVRM, confère le fichier GPS. En 5 km, tous les gars derrière moi m'ont rattrapés et dépassés, ils ont l'air d'avancer facile tandis que je me traîne lamentablement à 22. 

Pour ajouter à la difficulté du vent, quelques averses s'abattent sur ma carcasse, je suis bien mouillé. Je me fais une petite frayeur en traversant un pont en bois avec les planches dans le sens de marche, c'est hyper glissant et ma roue avant commence à se dérober. Par chance, je rattrape le vélo in extremis. Nouveau coup dur pour le moral. J'insiste jusque Granby mais va falloir prendre une décision. 

Km 80, je me vélogare au Vélo-Gare face au lac, je m'assieds à une table sous abri, une nouvelle averse se déverse avec force, je grelotte. Je texte à ma chérie mon état de décomposition avancée, je lui indique que mon moral se trouve dans mes chaussettes ... mouillées ! C'est décidé, je vais rentrer, je ne suis plus motivé pour continuer, m'imaginant dans le vent, la pluie et les côtes à venir. Sur ce coup-là, pas très fort mon mental pour les brevets, que se passe-t-il ? Je suis tanné et je cède à la facilité. J'attends la fin de l'averse et fais demi tour à mon bécyk. Je suis déçu pour mon Piuma de ne pouvoir aller explorer les environs des monts de Sutton aujourd'hui, ce sera pour une autre fois. 

Sur mon retour, j'aperçois Simon qui arrive seulement, que lui est-il arrivé, problèmes mécaniques, erreur de GPS ? Je le salue et file maintenant vent dans le dos, ça change tout. En plus, la piste est en pente douce, j'ai l'impression que la forme est revenue mais pas la motivation. Même les averses cessent et le soleil tente une sortie. J'aurais peut-être dû encore insister une heure, mais c'est trop tard, c'est fait. J'ai abandonné le 300, il faut assumer cette décision, il n'y a pas de honte à cela. 

St Césaire est vite atteint avec ce courant d'air favorable, trop facile. Je m'arrête au Tim pour refaire le plein d'énergie avec un chili et un café-beigne. Il me reste 45 bornes pour en finir, vent dans le dos, une plaisanterie. Je fonce à plus de 30 de moyenne, je suis motivé ... pour rentrer chez moi, pas de regret. Je suis peut-être en train de faire une écoeurantite aigüe des brevets, faudra que je fasse le point avec moi-même, une petite pause et on y verra plus clair. Peut-être faire plus de vélo loisirs, voyage, découverte. Je dois d'ailleurs préparer un parcours pour deux jours de vélo avec mon fiston de 10 ans, c'est lui qui m'a demandé d'accomplir un 100 km sur une journée, c'est son défi à lui! 

Je dépasse Chambly sur la 112, certes bien pavée mais truffée de roches et autres objets contondants. Et ce qui devait arriver, arriva, loi de Murphy. En approchant de St Hubert à la fin de cette fameuse 112, mon pneu arrière roule sur une roche ou plutôt une broche et c'est la crevaison. Maudit pneu Cadence a marde. En réparant, j'observe de plus près la surface du pneu ayant à peine 1000 kms, il est déjà détruit, rempli de coupures, d'entailles, bouts de verre et de roches incrustées. Vraiment trop tendres ces Pro Pulsion Kevlar, je vais vite les changer et remettre mes GatorHardShell préférés qui n'attendaient qu'un autre flat pour prendre du service. Une auto s'arrête pour me demander si j'ai tout ce qu'il faut pour réparer, sympa le gars. Je le remercie car ça va aller. 

Mon Piuma renversé par un flat sur la 112

Je réintègre mon bled de banlieue à St Lambert avec 153 bornes au compteur, un demi 300, somme toute, le premier brevet de 150 du club. C'est aussi la première fois que j'arrive avant Fred, yes ! Je constate que je n'ai pas eu d'averse pour le retour, j'espère que mes compagnons auront aussi profité de cette accalmie météo. Je leur souhaite un bon brevet par la pensée, ces courageux, ces motivés. Ce n'était pas le cas pour moi aujourd'hui, mea culpa ! 

La moralité de l'histoire, c'est que si t'es pas motivé, reste couché ! J'avais prévu de faire le 400 et le 600 dans la foulée du 300. Mais fort de cette expérience, je vais peut être passer mon tour pour cette année. A moins que la flamme du breveteux qui brûle en moi, ne se rallume. A bientôt, peut-être ... 

A bientôt, peut-être ...

Pour la petite histoire, Marc m'a demandé le soir même par messagerie Facebook, comment s'était déroulé mon brevet. Je lui ai répondu que j'avais dû faire demi tour quand je me suis souvenu que je devais voter ce samedi 6 mai pour l'avenir de la France, avant la fermeture des bureaux de vote !

Je doute qu'il m'ait cru. 
Et vous, croyez-vous à toute cette histoire de manque de motivation ? 
Franchement ...