samedi 20 mai 2023

400 Otta...wet, mouillé, rainy, pluvieux ...


Prologue


La troisième épreuve qualificative pour PBP 2023 se profile déjà. Ce 400 inédit vers la capitale fédérale est jugé facile, avec ses 1700 mètres de D+ seulement. À titre d'information, pour un brevet de la catégorie du Paris-Brest, il faudrait 1000 mètres de D+ par tranche de 100 km, soit 4000 mètres pour un 400 kilomètres.

Du coup, cette balade vers Ottawa est cochée par plusieurs randonneurs, adeptes du PBP ou non. C'est donc une vingtaine de participants qui s'annonce sur le site du CVRQ. 

Cependant, la météo en yoyo de ces dernières semaines, risque d'être vraiment exécrable pour ce samedi. Ce qui provoque une discussion acharnée sur Slack, notre forum du club sur le net. Tout le monde y va de sa méthode pour prévoir la quantité de pluie qu'on va recevoir 5 sur 5 lors de la randonnée. 

La seule inconnue est de savoir à quelle heure et à quelle intensité le ciel va nous tomber sur la tête, par Toutatis ! 

Déluge prévu pour ce 400, mais quand ?

À quel moment va-t-on se transformer en hommes et femmes grenouilles ?

Quand pourra-t-on chanter, il pleut, il mouille ...



Samedi 20 Mai, sur la ligne de départ


Dur, dur de mettre le cadran à 2h du mat, sans compter qu'il faut se coucher vers 20h la veille afin de mettre un peu de sommeil en banque !

400 bornes est une distance critique à négocier. On ne peut prévoir dormir à mi-parcours, quoique tout est possible avec les 27 heures de délai. En général, on roule la distance d'une seule traite, nous laissant éveillé presque 24 heures avant de replonger dans les bras de Morphée.

Mitch et Ralph sont aussi matinaux que moi

Comme c'est mon tour de distribuer les cartes de brevets, je dois être sur place un peu en avance, afin de rassembler le troupeau. Pour 4h15, je suis donc au stationnement incitatif de la gare de Vaudreuil-Dorion, après moults détours dus à de nombreux travaux sur les autoroutes métropolitaines. Ceci engendre d'ailleurs quelques retards pour les participants, arrivant en majorité à la bourre. 

Du retard à cause de la construction sur la 20 et la 40

Certains n'ont pas été pognés dans les labyrinthes routiers car ils sont venus à vélo de Montréal. Ce sont Carl, le missile du club, ainsi que Pierre, le breton, avec son vélo de gravel, qui veut se tester en rallongeant la sauce. Cela leur fera un beau 500 bornes dans les pattes !

Pierreau est venu de Montréal à vélo, chapeau !

Pour ne pas mettre trop de pression aux attardés, je prends la décision d'attendre que tout le monde se prépare avant de prendre le départ. C'est plus sympatoche de partir ensemble, même si on doit prendre 5 minutes de retard. Un brevet n'est pas une course, surtout sur une randonnée d'une vingtaine d'heures. 

Chacun se prépare au départ, David règle son disque

Côté météo, elle s'annonce comme prévue durant la semaine. Le vent devrait être un facteur négligeable mais la pluie sera bien présente, et en quantité s'il vous plait. La seule inconnue est de savoir quand on va la recevoir d'aplomb ! Les pronostics sont lancés. Selon Windy.com mon application préférée, ce serait vers les 11h-midi, à suivre !

Y a des maringouins ce matin, tout de jaune vêtus !

Sur les 22 inscrits, seulement deux riders ne se présentent pas à la feuille de pointage. Il s'agit de Jo, notre président, qui a mal dormi car ayant trop bouffé de pâtes la veille. Et l'ami Jocelyn, victime d'un bobo physique, qui a du renoncer pour aujourd'hui, ce n'est que partie remise.

Encore des attardés, dépêchez-vous Gilles et Régis, dit Gaby !

Tout le monde est enfin prêt, nous pouvons prendre la photo de groupe. Ça fait plaisir de voir tous ces sourires radieux. Partir au sec est déjà une victoire pour nos randonneurs motivés. 

Ave CVRQ !!! les Randonneurs qui vont s'en prendre plein la gueule vous saluent !

5h08, je déclenche mon Garmin. C'est parti pour 400 bornes de pur plaisir !



Étape 1, de Vaudreuil-Dorion à Alexandria, 81 km


Départ d'un gros groupe de quinze unités. Carl la Fléchette, nous dépasse en prenant une vidéo visible sur son compte Strava, cool ! Bye bye, l'éclaireur du club.

Quatre retardataires s'élancent quelques minutes plus tard, ce sont Jean, Martin D, Gilles et Régis, le frenchy de Toronto. 

La route pour débuter est agréable. Nous sommes déjà dans la nature à la différence d'un départ urbain ou on doit s'extraire de la banlieue pendant quelques kilomètres. La nature s'éveille en même temps que nous, peu de vent, ça papote dans la joie et la bonne humeur.  

Départ direct dans la campagne, génial !

Nous filons vers le St Laurent plein sud, que nous rejoignons au km 10. Puis Chemin du Fleuve direction ouest, on bifurque à droite plein nord au km 23. Faut bien regarder son GPS sinon gare aux erreurs.

On longe le fleuve sur le chemin du fleuve, étonnant !

Les attardés nous rejoignent, sauf Régis que nous ne verrons pas de la journée. Dommage l'ami de n'avoir pu re pédaler ensemble. Ce fut un plaisir lors d'un 200 des 2 Traverses, l'an passé.

Km 30, pause pipi en pleine pampa, que de pets ! Certains s'arrêtent, d'autres continuent, bref c'est la débandade. Le beau groupe est soudain éparpillé. Chacun doit sprinter pour recoller aux précédents.

Pause pipi en pleine pampa, que de P !

Nous rattrapons la 201. Grosse descente ou je frise les 65 km/h, vitesse maxi du jour. Grisés par l'allure, certains oublient de tourner  à gauche sur le chemin St Henri, Gaby en tête. Première erreur de navigation pour notre rouleur gaspésien, ce ne sera pas la dernière !

À l'assaut du massif de Rigaud en sous-bois

Le regroupement d'une douzaine de cyclos s'effectue dans la côte de l'érablière. Nous culminons à l'altitude suprême du brevet, soit 156 mètres. Wow, sortez les masques à oxygène ! 

Ravito sirop d'érable à l'érablière St Henri

J'en arrache un peu dans la côtelette avec mon vélo plus chargé que d'habitude. Avec la pluie et la nuit, il faut prévoir des couches supplémentaires pour être bien couvert et ne pas prendre froid. Il faut que je m'ajuste, ça ira mieux par la suite. 

Après le massif du mont Rigaud, cap au sud-ouest, vent de sud léger. Km 50, bonne route descendant en faux-plat sur quelques kilomètres. On déboule dans Très Saint Rédempteur, ce nom m'amuse toujours. 

Km 60, nous voilà en Ontario. Des relais s'organisent dans la plaine. Ce sont souvent les mêmes qui tirent le paquet. Les autres suivent comme des moutons, dont moi en passant. Mais j'ai l'excuse de prendre des photos, c'est pour cela que je reste à l'arrière ! Je dois aussi avouer que je suis une petite cylindrée, pas assez puissant pour emmener un peloton très longtemps, à 30 de moyenne, vent dans le pif.

Ben non, chus pas toujours derrière !

On retrouve à l'avant David, Martin H, les 2 Michel, Olivier, Sebastian, Philippe et la valeureuse Kathia, notre seule féminine de la gang. Celle-ci prend d'ailleurs un long relais d'une dizaine de kilomètres, sans que personne ne la dépasse, pour soulager son effort. 

Il y aurait bien des choses à revoir dans la conduite de notre peloton. Par exemple, fixer la durée et le passage des relais. Déterminer l'allure constante à établir, car le premier a souvent tendance à accélérer, en mode contre la montre. Enfin, le positionnement des cyclistes dans le groupe, savoir bien se placer en fonction du vent, pour bénéficier de l'abri de celui qui précède. Ceci en toute sécurité, en prévenant des autos surgissant de l'arrière. Bref, un cours de peloton 101 serait à proposer, comme le font certains clubs, comme Vélo Passion ou Maglia Rosa.

Une vingtaine de bornes sont écoulées ainsi. Nous arrivons au premier contrôle d'Alexandria du km 81, à l'Esso-County, il est 8h10, à 27 de moyenne, merci les locomotives.

Ontario, nous voici !

Pause sanitaire, pointage carte, boisson énergétique Gatorlyte dans la gourde, banane et sandwich tirés de la sacoche, faut se vider pour alléger le vélo ! 

Y a de la joie à Alexandria

Pour l'instant, le ciel gris retient sa pluie. Mais c'est pour quand le feu d'artifice ?

Ça va péter ! Mais quand ?



Étape 2, d'Alexandria à Winchester, 75 km, total 156 km


Onze minutes plus tard, c'est un nouveau départ d'une douzaines de riders. Il faut rouler sur cette route plate, quasi rectiligne et presque toujours dans la direction sud-ouest. 

Service pour l'Amoureux, intéressé Olive ?

Nous franchissons les 100 km alors que les nuages se font de plus en plus menaçants. On doit lutter contre un petit vent de sud qui a forci annonçant l'arrivée de la pluie. 

Cherchez l'intrus parmi les Schtroumpfs

Km 125, première ondée de la journée, ça ne dure pas. Certains s'arrêtent pour enfiler l'imperméable et autres protections, moi non. Le peloton se morcelle, perdant sa belle unité. Je fais une prière pour que les hostilités mouillées commencent seulement à partir du 2ème contrôle de Winchester. 

Dernière photo au sec !

Deux kilomètres avant le checkpoint du km 156, une belle averse se présente. Je me dépêche pour éviter d'être trop rincé. 

Ouf, arrêt au Tim, nous voilà au sec. Mais pas au chaud, la clim nous envoyant un petit air frisquet. On y retrouve quelques amis, dont Jean et Martin D, deux échappés du matin. 

Deux échappés du matin

Beaucoup de monde dans la file, heureusement je suis dans les premiers servis. Au dehors, c'est le déluge qui s'installe pour de longues heures. 

Ça y est, c'est le déluge !

Je me commande un sandwich irrésistible au bœuf, un café 1-1 avec un scone, genre étouffe-chrétien. Nous cassons la croute tous ensemble, certains se changent en homme grenouille et retournent affronter un univers aquatique. 

Mitch et Seb se régalent au Tim

Je vois arriver Gaby, Emmanuel et Kathia, je décide de les attendre pour rouler plus tranquillement. Le problème, c'est qu'ils commandent leur repas alors que j'ai terminé le mien. Moralité de l'histoire, ma pause va durer près d'une heure ! 

Mes nouveaux amis se restaurent encore, grouille avant qu'il mouille !

Le rapide Casey débarque à son tour, il a été victime d'une méchante crevaison, lui bousillant son pneu. Heureusement que Michel G lui a gentiment offert celui qu'il emporte en cas de problème de ce genre. Notre anglo a pu ainsi réparer et continuer son brevet. 

Mes acolytes ayant fini de se sustenter, nous nous rhabillons pour affronter des conditions équatoriales. Pour moi, ce sera sur-chaussures, coupe vent et protège pluie Goretex, rien sur mes jambes nues, il ne fait pas si froid. 

Nous repartons tels les quatre mousquetaires protégeant leur reine. Quatre crapauds et leur grenouille, croa, croa !!!



Étape 3, de Winchester à Ottawa, 63 km, total 219 km


C'est parti pour s'éclater dans les flaques d'eau. Autant se faire une raison, on va en avoir pour la journée. Les photos sur le vélo vont se faire rares, l'appareil étant bien rangé dans la poche arrière du maillot, avec l'imper par-dessus. Pas facile de le sortir de sa cache, c'est déjà une manœuvre assez dangereuse au sec. Alors sur route mouillée, je préfère tenir le guidon avec mes deux mains.

Nous empruntons à présent la route 43, assez passagère, mais dotée d'un bel accotement bien asphalté. Casey est le plus rapide de la bande, il se détache vite en avant. Gaby ne peut s'empêcher de lui coller aux basques, explosant notre petit groupe. Au bout de quelques kilomètres, notre gabspésien abandonne sa vaine poursuite, lui-même explosé. Il laisse filer notre anglo, disparaissant de notre champ de vision.

Km 174, nous quittons la grande route pour remonter plein nord vers Ottawa. La pluie tombe sans discontinuer, tantôt forte, tantôt faible. À la longue, on s'habitue. Ce soir, il va nous pousser des nageoires !

Km 182, nous longeons la rivière Rideau, nous la suivrons sur près de 50 kilomètres, jusqu'au centre ville de la capitale. De temps à autre, nous changeons de rive. 

Au km 192, j'avais spotté sur Google un restaurant panoramique avec des cygnes barbotant sur la rivière, Swan on the Rideau. Dans mes rêves, la belle boisson fraiche, bu sous un parasol, en regardant la marina de bateaux et les touristes en maillot !

Pour l'heure, c'est dans ma bulle ... d'eau que je pédale, en attendant que les kilomètres défilent rapidement. Jusqu'au prochain arrêt nous mettant au sec.

Puis le trafic routier s'intensifie sur la route 73. Je mène le quatuor à une allure relax, autour des 25 à l'heure, le vent nous poussant faiblement. Km 202 puis km 207, nous traversons le Rideau pour une énième fois.

À 500 mètres du 3ème contrôle, nous apercevons Olivier et Mitch sur la piste cyclable à proximité, vélo retourné, en train de réparer un flat. Ce n'est vraiment pas de chance.

Km 219, nous garons les bécyks devant un McDo de la banlieue, il est 14h30. La pause originale devait se faire en plein centre ville, proche du Parlement. Mais après consultation des Randonneurs Ontario et de quelques personnes connaissant la place, il nous a été fortement recommandé d'éviter les endroits trop touristiques, et mal famés. Est-ce qu'Ottawa serait en train de devenir le Chicago des années 1930 ?

McDo, toujours une valeur sûre pour Gaby

Regroupement général au royaume de Ronald. Kathia voulait aller au Farmer's Pick, considéré plus santé, elle ne semble pas apprécier les fast foods. 

Casey, notre anglo unlucky, mieux vaut en rire !

Pour la majorité d'entre nous, c'est ration de burgers, frites et coke. Il est important de remettre du fuel dans le réservoir. Chacun se refait une santé. On profite aussi d'être à l'abri pour une séance de déshabillage rhabillage. Cependant, avec l'effet de la clim, je me gèle les os. Dehors, l'humidité moite est plus supportable. 

Séance déshabillage pour Michel

Trente minutes plus tard, un groupe de onze cyclos se recompose pour repartir ensemble. On retrouve les 2 Michel, Olivier, Ralph, Loïc, Gaby, Kathia, Emmanuel, Philippe, Casey et moi-même. 

Tant qu'à être mouillés, on va prendre la pose !

Au moment de reclipper, Pierre apparait dans le décor. Le pauvre roule seul depuis ce matin mais cela ne semble pas le déranger. Il a toujours un métro de retard et cela va se répéter jusqu'à l'arrivée.

Toujours un métro de retard pour Pierre



Étape 4, d'Ottawa à Papineauville, 77 km, total 296 km


La bande de randonneurs repart pour une dizaine de bornes sur les pistes cyclables d'Ottawa, traversant des parcs, longeant le canal Rideau. Gaby est notre cher leader, il a vécu dans cette ville pendant deux ans, il se sent comme chez lui. 

L'avantage du temps pourri, c'est que nous croisons très peu de promeneurs, nous laissant libre de circuler sur la piste. Un samedi par beau temps, ce serait inondé ... de monde. 

Ralph est la nouvelle victime d'un flat à la roue avant. Olivier s'arrête pour l'aider à réparer, belle solidarité. Nous ne les reverrons plus du brevet. 

Olive et Ralph après leur crevaison

C'est le festival de la crevaison aujourd'hui. Chacun prie pour passer entre les gouttes de la malchance, à défaut d'éviter celles de la pluie. Surtout que mes pneumatiques sont un pneu usés. C'est déjà bien chiant de réparer un flat, mais en plus sous la flotte, ce serait le summum de la détresse. 

Nous parcourons le downtown d'Ottawa par Metcalfe street pour rejoindre Wellington et la plaine du Parlement. 

Des voix sorties de haut-parleurs nous accueillent, il y a souvent des manifestations à cet endroit stratégique du Canada. 

Y a toujours de l'animation à Ottawa, même un jour de pluie

Pour nous, ce sera juste un shooting de band, nine men and woman, riding in the rain !

9 randonneurs in the rain

Bye Bye Otta...wet !!! 

Martin Bolt in Ottawa

Casey, notre english spoken rider, prend le lead. Gaby le follow, tel un poisson pilote en milieu humide. 

Nous quittons enfin la capitale fédérale. Ces grandes villes sont idéales pour le tourisme mais moins super à traverser pour les brevets. Cela fait baisser la moyenne, quoiqu'on s'en fout, puisque ce n'est pas une course !

Direction Est sur Sir George-Étienne Cartier parkway, nous rentrons au bercail, c'est bon pour le moral. Les deux échappés sont rejoints par Loïc et Emmanuel, les frenchies aux fourmis dans les jambes. Je mène le reste de la troupe à un tempo plus relax.

Km 238, la route est fermée pour les autos, mais pas pour les vélos. Youpi !

Km 245, le quatuor de tête nous induit en erreur de navigation, Gaby est encore le responsable, grrrr ! Il fallait bifurquer à gauche et attraper la belle piste cyclable tournicotant, longeant the Ottawa River. 

Le niveau de l'eau est encore très haut, elle affleure la piste, heureusement légèrement surélevée. Aux alentours, tout est inondé. 

Km 254, nous débouchons sur la grosse route 174 en travaux, bordée d'un bon accotement, fort heureusement. Nous arrivons au traversier Bourbonnais, une chance qu'il soit opérationnel, le club a pris soin de vérifier. Une semaine plus tôt, ça ne passait pas. 

Dépêche Mitch, le traversier accoste

Regroupement des effectifs, Gaby, Loïc, Philippe, Emmanuel, les 2 Michel, Kathia et moi.  Casey s'est enfuit, prenant le bateau précédent. Nous embarquons sur la navette, je paye la note pour les huit rescapés de notre gruppetto, cadeau du CVRQ. C'est l'avantage de rouler avec un membre du polit bureau, de surcroit avec le trésorier, certainement le plus corrompu ! À 2$ fois 8 personnes, ça ne devrait pas ruiner le club.

Gaby prêt pour une belle croisière touristique

La traversée n'est malheureusement pas très touristique. Avec les embruns du large, nous sommes en transit, et transis sur le pont. Je m'affaire à me sustenter puis à tenter de recharger la batterie de mon GPS qui n'est plus qu'à 22%. Tiendra-t-il jusqu'au prochain checkpoint ? 

Nous accostons à Masson-Angers, on y retrouve la 148 et le Québec, bienvenue chez les chtis mouillés ! Nous resterons sur cette route pour les 70 prochains kilomètres. Bon accotement, malheureusement plein de craques, on regrette presque l'Ontario !

Encore une trentaine de bornes avant de mettre nos os au sec, les ondées continuent de se déverser. Le groupe de 8 se scinde encore, Gaby, Emmanuel, Loic, Philippe et moi, suivis par les 2 Michel qui assistent Kathia, roulant à un rythme plus pépère.

Thurso, Plaisance puis Papineauville au km 296, 4ème contrôle, il est 18h30. Un dilemme se présente, va-t-on au McDo ou au Tim ? C'est l'enseigne canayenne qui l'emporte aux suffrages, histoire d'alterner les burk foods. En plus, il y a de la soupe chaude !

Premier entré, premier servi, il n'y aura que Gaby qui aura droit à un breuvage réconfortant. Pour les autres, ce sera café, coke, sandwiches, patates et autres sucreries. 

Pas un chat dans le restau, nous nous installons sur la grande table centrale. L'ambiance est tout de même au beau fixe, malgré ce temps pourri, à ne pas mettre un chat dehors, ceci expliquant cela. Nous avons tous le même objectif, en finir avec ce terrible brevet noyé dans l'humidité permanente.

Belle tablée de randonneurs contents d'être las et trempés

Je profite de la pause pour enfin recharger GPS et écouteurs sur ma batterie USB. Loïc prend des notes sur mon équipement. Je ne peux lui offrir une plug pour son cell, je n'ai que deux entrées possibles. 

Casey nous rejoint quinze minutes plus tard, il a écopé d'un autre flat, not lucky notre anglo !

Même Kathia apprécie la chaleur de l'ambiance

Après 40 minutes de relaxation, tout le monde se remet en condition pour attaquer la nuit. Celle-ci devrait nous envelopper de son noir manteau pour les 100 dernières bornes. 

Pierre fait à nouveau son apparition alors que nous sommes sur le point de décoller. Coucou l'ami, et RV au prochain contrôle, dans 41 bornes. 



Étape 5, de Papineauville à Hawkesbury, 41 km, total 337 km


Départ en fou pour certains, Casey en tête, le plus véloce d'entre nous. Gaby et Loïc accélèrent pour lui coller au train. Les cinq autres forment le traditionnel gruppetto.

Après Montebello, km 305, nous serrons les dents en prenant une averse encore plus forte que les autres. Plus rien ne peut nous arrêter, nous sommes aussi à l'aise que des poissons dans l'eau. 

Km 316, nous apercevons les lumières rouges de deux cyclos à l'arrêt. Ce sont Loïc et Gaby s'entraidant pour réparer une crevaison, une de plus, quelle hécatombe !

Les 2 Michel prennent des relais à allure régulière. Quand Emmanuel passe devant pour tirer à son tour, nous devons le rappeler à l'ordre. Hey mon Manu, prendre un relais, ce n'est pas piquer un sprint ou appuyer à fond sur les pédales. C'est adopter une vitesse adéquate pour que les copains derrière se reposent. 

Km 328, nous évitons le shortcut de Calumet pour rester sur la 148, ayant un meilleur revêtement. L'obscurité s'installe progressivement. J'allume ma loupiote avant, celle derrière fonctionne depuis un moment. Et pas en mode clignotant, svp, ça fait mal aux yeux des suiveux !

À Greenville, nous quittons la 148 pour nous balader dans les rues du village. C'est agréable car ça redescend sur la rivière des Outaouais. Nous revoici en Ontario en franchissant la côtelette du large et long pont d'un kilomètre. 

Km 337, coucou Hawkesbury, 5ème checkpoint localisé au Gas King, il est 21h. 

L'endroit est ouvert 24-7 et il pue la cigarette. Le drôle de gérant de la boutique ne veut pas signer nos bouts de carton détrempés. D'ailleurs, on se demande s'il sait écrire, le bougre.

C'est quoi ce dépanneur qui pue la cigarette ?

Je fais donc office de bureau de contrôle, comme au PBP, attablé sur une chaise bancale dans la shop. Nous nous amusons de cet instant insolite. Mitch me prend en photo mais elle sera floue, ma caméra embuée, commençant à souffrir des intempéries. Vraiment pas terrible comme point de rassemblement, mais au moins, on est au sec. 

Je boulote un sandwich fatigué lui aussi, sorti de la sacoche. Je sirote un coke, histoire de me remettre un peu de sucre dans le corps. Ce n'est pas vraiment pour me déshydrater, avec tout l'eau qu'on se prend sur la gueule depuis presque 200 kms. 

On fait la file devant le contrôleur du brevet

Vingt cinq minutes plus tard, on repart sous la pluie et dans la nuit noire. Je grelote !



Étape 6, de Hawkesbury à Vaudreuil-Dorion, 65 km, total 402 km


Huit desperados reprennent la route sur leur monture. Nos lumières éclairent les flaques d'eau, en essayant d'éviter les trous qui s'y cachent. Tout le monde est motivé pour cette ultime étape. Quelques uns montent le tempo et s'échappent par l'avant. Pas envie de m'exciter le pompon, je reste à mon rythme. 

Km 346, bifurcation à droite, ceux devant dont Gaby, encore lui, ont continué tout droit. Certains rebroussent chemin, notre gaspésien insiste et se fourvoie royalement. Résultat, 4 km de rallonge, on ne le reverra pas jusqu'à l'arrivée. 

Après cette nouvelle erreur de navigation, me revoici devant à conduire le troupeau. Par une voie de service, nous longeons la 417 Transcanadienne. 

Et puis, miracle, la pluie s'arrête ! Nos visages ne sont plus fouettés par les gouttes d'eau. Malgré la noirceur, nous apercevons le ciel qui se dégage. Va-t-on terminer au sec ?

À St Eugène, c'est à nouveau la débandade. Les deux Michel, Emmanuel, Loïc et Philippe prennent le large. Il ne reste que Kathia pour m'accompagner, nous n'avons pas le gout d'accrocher les wagons. Nous pédalons tranquille à notre tempo, doucement mais sûrement. 

Je m'arrête sous un lampadaire pour changer ma batterie de lumière. Ma partenaire m'attend gentiment, nous terminerons ensemble le brevet.

Km 374, voici Rigaud tout éclairé, sans âme qui vive, dans cette ville déjà endormie. Aux alentours de 23h, tous les commerces sont évidemment fermés, même pas un Tim d'ouvert. 

On sort du bled, l'air est doux, la balade est redevenue agréable. Ça sent la fin des haricots, on savoure les derniers kilomètres de cette longue expédition. Plus tellement envie de manger ou de boire, pourtant il le faut, pour ne pas tomber en panne sèche. 

Pour passer le temps, on papote. Kathia me parle de sa job, la neuropsychologie, c'est ben intéressant. À propos de neurones, je lui raconte l'histoire de ma crampe au cerveau, c'est à dire de mon AVC contracté en 2002. Cette loterie de la nature m'a rendu hémiplégique côté droit pendant 6 mois. Par chance, la plasticité neuronale a permis de reconnecter la matière grise aux muscles, me rendant ainsi la mobilité. 

Alors que ma forme physique revenait peu à peu, je décidais en 2012 de m'attaquer au défi du PBP. Et me revoici sur un vélo depuis ce temps. Kathia est impressionnée par ma volonté et ma pugnacité.

Nous traversons Hudson, bordé de belles et grosses cabanes toutes illuminées. Ça a l'air bien chicos par icitte ! Je connais cette route de jour. Elle était pourtant bien maganée mais l'asphalte a été récemment refait, c'est le pied de rouler dessus. 

Malheureusement, à partir du traversier vers Oka, les craques reprennent le dessus, finie la rénovation. Il faut zigzaguer sur la largeur de la route pour ne pas s'enfarger dans les cratères. Quelques rares autos nous dépassent, on se range sur le côté.

Km 398, nous retrouvons la civilisation et les lumières de Vaudreuil-Dorion. Je m'interroge toujours à propos de cette grande tour carré qui ne sert à rien, visible à des lieues à la ronde. 

À un feu de circulation, nous retrouvons Loïc et Philippe qui semblent égarés et cherchent leur chemin. Ils emboitent nos roues, nous terminons par la piste cyclable jusqu'au parking de la gare. Dans les derniers hectomètres, Philippe disparait des rétroviseurs, victime d'un flat à son tour ! Quelle belle journée pour les crevaisons !

J'arrête mon GPS, 402 bornes au compteur, il est minuit et 19 minutes, soit 19h19 pour boucler le brevet, j'aime ce nombre. Wow, c'est mon meilleur temps sur la distance. Faut dire que les éditions précédentes étaient plus vallonées. 

Gabriel arrivent quinze minutes plus tard, après sa énième erreur de parcours. Un cours GPS 101 s'impose dans le cadre des webinaires du CVRQ cet hiver. N'hésitez pas à y participer pour éviter de rouler des kilomètres supplémentaires. 

Notre gruppetto heureux d'en finir à l'arrivée

Les deux Michel et Emmanuel, arrivés depuis une vingtaine de minutes, terminent de ranger leur matose. Bye bye les amis, à bientôt, pour de nouvelles aventures.



Épilogue


Bilan de cette journée pluvieuse que jamais, de ce brevet rebaptisé sans contredit : 

400 Otta-wet !!!

Belle solidarité dans les groupes de même niveau. Beaucoup de crevaisons. Heureusement, aucun incident à déclarer. Nous avons eu de la chance dans notre malheur. 

Kathia, comme pas mal d'entre nous, est bien contente de remettre des habits secs sur sa peau, au chaud dans son auto. Chacun ré harnache son fidèle destrier sur ou dans son véhicule. Puis dispersion aux quatre coins de Montréal. 

J'aperçois Philippe, de retour après sa réparation de crevaison et le pointage effectué au Couche Tard à 500 mètres de là. Celui-ci était facultatif puisqu'on avait déjà bouclé les 400 bornes, en arrivant au stationnement. 

On se salue en se disant à la prochaine. Lui doit encore faire la route jusque Sherbrooke, c'est un courageux randonneur.

À la prochaine, sous de meilleurs auspices. 

Ce fut vraiment un brevet d'anthologie !

Jamais autant roulé sous la flotte.

Après cette épreuve dantesque, le prochain 400 nocturne dans 2 semaines et le 600 dans 3 semaines, ne devraient être qu'une formalité. 

Plus qu'un brevet pour le sésame du PBP 2023.

Liberté et Solidarité !

Vive le CVRQ !


samedi 6 mai 2023

300 Drummondville, poussé à l'aller, refoulé au retour !

 

Prologue


Premier 300 de la saison, les choses sérieuses commencent pour les qualifs de PBP 2023. 

Une belle météo est annoncée sur un parcours vous emmenant à Drummondville, sans difficulté notoire, dixit le texte de propagande sur le site du CVRQ !

Cette offre alléchante contribue à faire grossir la liste des participants. Résultat, 34 randonneurs s'alignent, dont 3 randonneuses, soit un peu moins de 10%. Ce maigre ratio correspond malheureusement à la réalité des épreuves longue distance à vélo. Il semblerait que les filles soient moins fêlées que les gars. 

Et pourtant, il parait que le sexe féminin serait meilleur en endurance que le sexe, dit fort. Pour preuve, la victoire de Fiona Kolbinger en 2019 à la Trans Continental Race, une course de plus de 4000 kms à travers l'Europe ! 

Fiona Kolbinger, vainqueure de la TCR 2019

Donc, respect à nos 3 participantes de samedi. 

Tremblez messieurs ... et roulez petits bolides !!!



Samedi 6 Mai, sur la ligne de départ


Le plus dur lors d'un brevet, c'est de s'extirper du lit !  Sortir aux aurores, pour aller rouler dans la fraicheur matinale. Mais une fois douché, l'estomac rempli d'un bon tit déj, on embarque sur le vélo, tout heureux de savoir qu'une belle journée nous attend.

Vers 5h30, la température est un peu frisquette ce matin. J'ai bien fait de couvrir mes bras, mes jambes et mes doigts, c'est plus confortable. Le stationnement des amoureux de la randonnée à St Lambert est rejoint rapidement.

Coucher de lune puis lever de soleil

Dans une ambiance amicale, c'est le rassemblement progressif de tous les inscrits. Pas un ou une, ne manque à l'appel. Tous sont motivés pour dérouler les 300 bornes prévues aujourd'hui en Montérégie, plate comme une galette bretonne. 

Rassemblement des troupes au combat

La majorité des cyclos a déjà roulé ce parcours, lors du 300 Centenaire de l'année passée, avec d'excellents souvenirs en tête. 

Jocelyn et Ionut vont découvrir ce 300

Le beau temps prévu est au rendez-vous, soleil all day long, sortez la crème solaire ! Bonne nouvelle, le vent d'Ouest sera favorable dès le départ, il devrait nous pousser fortement vers l'Est. En revanche, le retour sera une autre paire de manivelles. Il faudra rentrer au bercail dans la douleur. Attention à la fatigue accumulée, il risque d'y avoir des défaillances !

Déjà une défaillance ? Fred sur les rotules !!!

Il est presque 6h, c'est le temps de sortir son plus beau sourire, de lever les bras vers le ciel, pour la photo de groupe. C'est le seul moment du brevet ou nous sommes encore tous réunis.

Déjà une victoire d'être au départ, yeah !

Clic-clac kodak !

Liberté et Solidarité.

Et roule ma poule.



Étape 1, de St Lambert à St Ours, 61 km


Départ rapide par la piste cyclable la Riveraine, longeant le fleuve. Ça pousse fort par l'arrière, ça roule facile. Les rapidos ont déjà pris le large. Vues les conditions favorables, leur moyenne doit avoisiner les 40 à l'heure. 

Fred célèbre le Giro d'Italia commençant ce jour

Dans mon paquet, ça roule plutôt autour des 30 à l'heure, ce qui nous laisse plus de  souffle pour jaser. Je fais connaissance avec Alexandre, jeune cyclo fougueux voulant explorer notre discipline. 

Le schtroumpf président en plein papotage

Km 20, voilà Varennes, la sympathique piste à vélo achève. Notre imposant peloton est composé d'une vingtaine d'unités. Ceussent à l'avant oublient de regarder les indications de leur GPS ... et manquent le virage à gauche. Les premiers seront les derniers et vice versa. Avec Emmanuel, on se retrouve aux commandes pour guider la troupe hors du village.

Me voilà en tête à guider la troupe

Les fauves sont à nouveau lâchés dans la cambrousse. Propulsé par Éole, tout le monde s'en donne à cœur joie. 

Dans la bonne humeur, on vire à gauche

Gilles A commence déjà à en arracher, le tempo est trop rapide pour lui. Pas de pitié pour les plus faibles, il est irrémédiablement largué. Il faut savoir rouler bien abrité par ceux qui précèdent. La position est fonction du vent et de la direction empruntée. Avoir de bons jarrets est aussi nécessaire pour tenir le rythme imposé. 

Notre courageux Gilles A, décramponné avant le 1er checkpoint

Km 43, nous passons devant la pâtisserie Maison de Pierre, pas d'arrêt Paris-Brest aujourd'hui. Ce sera après le PBP, pour la Populaire de Septembre, ce sera le temps de raconter nos exploits de l'été écoulé. 

Passage devant la pâtisserie, ça sent bon le café et les PB

Encore quelques coups de pédale et nous voici déjà à St Roch, pour prendre le traversier.  Nous serons une vingtaine à passer de l'autre côté du Richelieu, la croisière est offerte par club. 

Prêt pour l'embarquement à St Roch

Règle numéro 1, toujours rouler avec le président Jo (Biden), ceci offre certains avantages. C'est surtout plus pratique de payer pour le groupe au complet plutôt que chacun sorte son petit change, que certains n'ont même pas. 

Selfie de Clément G, Jo Biden règle la note du traversier

Sur l'autre rive, nous accostons à St Ours. C'est le premier checkpoint au Marché Tradition du km 61, il est 8h15. Un peu plus de 2 heures pour faire 60 bornes, la moyenne est excellente, c'est toujours bon à prendre.

C'est la tradition de prendre une collation à chaque pause

L'endroit est idéal pour un contrôle de brevet. Belle épicerie bien fournie en bouffe, toilettes et tables à piquenique à proximité dans un joli parc verdoyant. Nous pouvons profiter du soleil matinal, tout en reprenant des forces, et s'occuper de nos petites affaires. 

Parc verdoyant bien équipé pour se refaire une santé

La température monte allègrement, on retire des couches superflues. 15 minutes de pause et nous voilà repartis, il y encore quelques kilomètres à parcourir. 

Toilettes, tables et station de gonflage, n'est-ce point merveilleux !




Étape 2, de St Ours à Pierreville, 47 km, total 108 km


Nouveau départ en groupe, nous continuons notre progression vers l'Est avec ce bon vent d'Ouest. Ça fly comme sur des roulettes. 

Km 70, Ste Victoire, nous bifurquons sur la 239. Bel asphalte, peu d'autos à cette heure, ce n'est pas si dangereux, mon Marcus ! Après 3 bornes survolées à 35 de moyenne, nous quittons déjà cet axe, presque avec regret.

Jolie bâtisse, agréable matinée pour du tourisme

C'est vraiment agréable de pédaler. Belles conditions météo, route tranquille, bonne ambiance sur nos bécyks, bref une matinée comme je les aime !

Traversée des villages en gang, sans forcer

Nous franchissons la rivière Yamaska et le village du même nom. Les couleurs de l'eau, du ciel, de la verdure sont magnifiques. Cela fera d'intéressantes photos de promotion pour la randonnée à vélo. 

Photo de propagande pour promouvoir la randonnée à vélo

Encore un petit effort pour rejoindre la rivière St François à Pierreville, dans la patrie des Abénakis. Y a même un endroit qui s'appelle Odanak, Kanado avec les lettres inversées, c'est drôle !

Gaby bien calé en franchissant le St François

Nous stoppons à nouveau les machines au Métro du km 108, il est un peu plus de 10h. Deuxième pointage-ravito, on se nourrit comme si c'était midi. Faut dire qu'on a déjà plus de cent bornes dans les mollets. Avec le déjeuner digéré depuis longtemps, on a aussi l'estomac dans les talons ! 

2ème contrôle au Métro, on a les crocs !

Le stationnement se fait le long d'un sinistre mur à l'ombre, dommage que ce ne soit plus convivial. Quelques tables et bancs seraient les bienvenus. On ne peut pas tout avoir. 

Cyclos le long d'un mur, les vélos sont les mieux lotis

Je me restaure avec une délicieuse salade santé, bacon, pâtes, brocolis, le tout arrosé d'une boisson énergétique Powerade, que je mets en banque dans mon porte bidon vide. Ce sera ma potion magique pour me remettre du power, si nécessaire. 

Jocelyn regarde cette belle randonneuse avec envie

Après vingt minutes, la majorité des cyclos est prête à repartir. Je sonne le glas pour redémarrer tous ensemble. Je suis agréablement surpris de voir les deux Michel, Yvon et d'autres, attendent les autres, pour mettre les premiers coups de pédale. Wow, quelle belle solidarité ! Il fallait absolument que ce soit noté. 

Wow, attente pour un nouveau départ, sympa les gars !

On attend même Sebastian, arrivé il y a peu, après son départ en retard de Montréal. Il avait été stoppé par un train de marchandises interminable.

C'est donc un peloton d'une vingtaine d'unités qui se remet en selle, en direction du prochain checkpoint de Drummondville. J'ai rarement vu cela dans notre bande de randonneurs. Un esprit club émergerait-il ? 



Étape 3, de Pierreville à St Nicéphore, 45 km, total 153 km


Nous avons obliqué à présent vers le Sud-Est, le vent d'Ouest est encore notre allier. Nous longeons à présent les charmants abords de la rivière St François. 

Par monts et par vaux, la troupe est repartie

Je papote avec Kathia au sujet des futurs brevets. Elle me demande si je participe au Gros 1000 de début Juillet, elle aurait voulu qu'on le fasse ensemble. Malheureusement, je ne l'ai pas mis au programme de ma préparation, le trouvant trop exigeant pour mes vieux os. J'en ai gardé un mauvais souvenir l'an passé, j'en reste un peu effrayé. 

Elle ne sait pas encore si elle fera PBP, bien qu'elle soit préinscrite, ce qui n'engage à rien, sauf à perdre 50 euros. Tout dépendra du fun qu'elle prendra au cours des prochains 400 et 600, distances qu'elle n'a jamais parcourues d'une traite. À suivre donc. 

On jase de tout et surtout de vélo !

La horde de cyclistes s'organise en relais. Je fais ma part avec Michel G à mes côtés. Le vendeur de pneus de St Jacques le Mineur est un bon Jack, fort apprécié au sein du peloton. Il va participer cette année, à son premier Paris-Brest, je n'ai aucun doute sur sa réussite. C'est un gars méticuleux et bien organisé, ancien coureur, fidèle aux cycles Marinoni. 

Michel G est un bon Jack

Je me répète, mais c'est vraiment cool de rouler au sein de cette bande de schtroumpfs. Avec Jo, nous sommes fiers du succès du CVRQ, qui en est seulement à sa deuxième année. Que de chemin déjà parcouru, c'est encourageant. Pourquoi pas une autre antenne du club à Sherbrooke. Philippe C qui vient de là, serait peut-être intéressé à attirer d'autres randonneurs avec lui ? À suivre aussi.

Avec Philippe C, peut-être une antenne du CVRQ à Sherbrooke ?

Bientôt, et oui, on roule plutôt vite, voici les faubourgs de Drummond, le trafic des autos s'intensifie. Nous passons devant le Comptoir lunch, ancien contrôle du 300 Centenaire. C'est un restau sympa du centre ville mais pas adapté à la vingtaine de randonneurs que nous sommes. Nous avons bien fait de relocaliser le checkpoint à 7 kilomètres de là, dans un endroit possédant plus d'espace de stationnement.

D'ailleurs, nous y arrivons vers midi. C'est le dépanneur Allard de St Nicéphore, lieu repéré l'année passée. J'y avais aperçu Yvon et Michel s'y étant arrêtés pour se sustenter. 

Un dépanneur à crème glacée et bière de microbrasserie

C'est encore excellent pour un arrêt de groupe. Il y a des tables à l'ombre ou au soleil, on a le choix ! Le magasin assure la bouffe, les sanitaires et la signature. 

À l'ombre ou au soleil, y a le choix

Il faut continuer d'alimenter la machine à muscles. Je m'achète donc un sandwich au jambon pas très appétissant mais qui remplit son rôle en carburant. Tout le monde se restaure dans la bonne humeur. 

Bande de Schtroumpfs en pleine restauration 

Certains se sentent des fourmis dans les jambes et se remettent en selle sans attendre le départ collectif. La belle cohésion semble avoir disparu alors que les premières difficultés vont être rencontrées. On revient au chacun pour soi et souffrance pour tous !



Étape 4, de St Nicéphore à Upton, 51 km, total 204 km


Je repars tout de même dans un paquet d'une dizaine d'unités. 

Après 150 bornes sans trop de difficulté, roulées à plus de 29 de moyenne, nous avons fini de manger notre pain blanc !  Tout va bien, tant qu'Éole nous pousse encore. 

Km 168, changement de direction et de sensations ! Ça monte un peu, et surtout, le vent nous fait maintenant face. Il va falloir passer au cash pour rentrer, en prenant le cap à l'Ouest.

On a fini de manger notre pain blanc !

Certains se font larguer dans les côtelettes, nous remontant au point culminant du brevet, soit 160 mètres d'altitude ! Pas de quoi fouetter un chat, mais il faut mettre le couteau entre les dents pour lutter contre la pente et un bon souffle d'air. 

Certains se font larguer (photo montage de Loïc)

Gaby et Jocelyn lâchent aussitôt. Puis, c'est au tour de Simon et Kathia de refuser de faire monter les pulsations. Ils préfèrent réduire sagement la cadence. 

Par orgueil, ou par connerie, je m'accroche aux basques de Jo, Francis, Yvon, Mitch et Michel. D'autres ont filé devant, comme Sebastian et Philippe. Mes locomotives continuent de pousser à vive allure, entre 25 et 30 dans le vent ! Tant que je me sens bien, je les suis.

Par connerie, je me mets en surrégime derrière les meneurs impitoyables

Dans quelques faux plats assassins, je dois forcer en danseuse pour rester au contact. Tout doucement, je m'épuise. Je commence à avoir mal au bas du dos. Mes jambes perdent de leur énergie. Mes voyants se mettent au rouge.

Km 188, c'est assez, je me laisse décrocher. Mon groupe s'éloigne peu à peu. Le contrôle est à 16 bornes, je vais gérer. Je rattrape le trio Yvon et les 2 Mitch, arrêté pour une pause pipi. Quand les trois me rattrapent, Michel G me dit gentiment de coller sa roue. Mais la puissance me manque. Je dois reconstituer ma réserve de glycogène. Ma potion magique Powerade n'a pas l'effet escompté, tel Astérix ! 

Ouf, un dernier stretch vent de côté me fait rejoindre Upton, km 204, vers 14h15. J'aperçois Pierre et Martin H arrêtés au Marché. Ce n'est pas le lieu de contrôle officiel mais on s'en fout, chacun va ou il veut, pourvu qu'il pointe sa carte. 

Je veux retourner à l'insolite Magasin Général, visité lors du 300 Centenaire. Le charme du lieu, ses toilettes à l'étage, sa jolie cour intérieure avec une fontaine en son centre, avaient fait le bonheur des cyclos présents. 

Le charmant Magasin Général d'Upton

Mais cette année, déception, il n'y a personne. Je me rabats sur l'Ultramar en face, ou Romain et Pierre (encore), cassent la croûte. Tant pis, ce sera là mon ravito. Rien ne me tente, pas de salade de glucides, ni de sandwich appétissant. Je prends des crottes de fromage, un Pepsi et un Magnum à la fraise. Faut manger ce qui nous fait plaisir à un moment donné !

Quelques randonneurs à l'Ultramar, éparpillés ... façon puzzle !

Je recharge tranquillement mes batteries lorsque nous apercevons Kathia et Simon déposer leurs bécyks dans la cour du Magasin Général. Pierre et moi allons les rejoindre. Nous faisons le point sur ce qui s'est passé dans les 50 dernières bornes. 

Notre groupe si soudé de tout à l'heure, a soudainement explosé. Chacun est éparpillé dans la nature, façon puzzle ! Je suis un peu dépité mais c'est comme ça. Chasser le naturel, il revient au galop. 

L'arrière cour du Mag-Gén, classée monument hystérique

Je profite de la pause des deux nouveaux arrivants pour m'étirer le dos. Je m'agenouille sur le pavé, bras tendus vers l'avant, tel un musulman faisant sa prière dirigé vers La Mecque. Cela rappelle une joke à Simon, incapable de retrouver le punch. Je l'ai googlée dans la mémoire du web.

L'Arabie, c'est ou dites ? C'est par là, mec !!

Au bout de 25 minutes, d'après mon Strava, je suis tanné d'attendre et repars donc seul. Comme je roule au ralenti, les autres me rattraperont certainement. 



Étape 5, d'Upton à St Césaire, 50 km, total 254 km


Me voilà donc solo dans la pampa. Je pédale à mon rythme pour me refaire une santé. La direction Sud me fait prendre le vent de travers. Je grignote du chocolat, bois du Powerade, afin de récupérer et retrouver des sensations.

Passé St Valérien de Milton, Simon, Kathia et Pierre me rejoignent par l'arrière. Ils ne roulent pas très vite, je n'ai pas de mal à les suivre. 

Je retrouve mon duo métronome préféré

Nous rattrapons un autre loup solitaire. C'est Emmanuel, lui aussi perdu dans la nature. Un club des 5 est ainsi reformé. Je le baptise les 5F, 1 Fille et 4 Frenchies ! 

... du nom d'un album de Céline, 1 fille et 4 types !

Du coup, ma force et ma motivation sont revenus. Je n'ai surtout pas envie d'errer seul dans les rangs isolés du ce coin de campagne. 

2 autres frenchies viennent grossir les rangs

La route est souvent maganée par ici. L'avantage est que nous ne sommes pas dérangés par la circulation, quasi inexistante. 

Le Mont Yamaska domine le paysage. Nous nous en approchons de plus en plus du côté d'Émileville, commune de St-Pie. 

Superbe panoramique du mont Yamaska par Philippe C

Nous l'escaladons même sur ses flancs, par le joli rang de la Montagne. 

À l'assaut de la montagne ... n'exagérons rien !

Descente rapide sur St Paul d'Abbotsford pour reprendre la Route des Champs. Quelques sections sur la piste, plein Ouest, vent de face, nous donnent le ton pour la route du retour. 

Vive le vent, vive le ven...dredi !

Chacun notre tour, nous mettons l'épaule (d'Abbotsford) à la roue ! La moyenne n'est pas aussi grisante que ce matin, elle oscille maintenant entre 18 et 23 km/h. Doucement mais sûrement, nous arrivons à la centrale HQ de St Césaire. 

Band on the run dans les oreilles, wind in the face dans les mollets

Le pont de la piste cyclable est barré pour travaux, nous remontons donc sur la 112 pour franchir le ruisseau.

Vers 17h, voici le 5ème contrôle salvateur, officiellement à l'Ultramar. Le groupe de Jo nous précédant, s'est installé aux tables du Subway. 

La bande à Jo ... Dalton, en phase restauration

Personnellement, j'ai envie d'un bon burger juteux avec frites et Coke, ce sera donc le McDo. 

Les 4 poursuivants accostent au McDo

Ma gang me suit, accompagnée d'un autre quatuor composé de Gaby, Jocelyn, Martin D et Gilles C qui arrivent justement. Nous nous engouffrons dans le royaume du fast food pour y engloutir quelques graisses, sucres et calories. Tout ce joyeux festin sera vite brûlé lors du retour.  

Le petite langue sortie de Jocelyn ne trompe pas, il se régale !

Trente minutes de pause sont prises, nous ne sommes pas pressés. La moyenne au Garmin est bonne, toujours proche des 27 à l'heure. Nous devrions largement arriver avant la noirceur, n'en déplaise à Jean R, m'ayant pronostiqué une arrivée tardive aux loupiotes !

Kathia en discussion avec Pierre, elle pense repartir en Westfalia

Tout le monde est ok pour la dernière étape. C'est un groupe de 8 unités, Kathia, Simon, Pierre, Gaby, Jocelyn, Martin D, Gilles C et bibi, qui se remet en selle pour la destination finale, dans 46 km. 




Étape 6, de St Césaire à St Lambert, 46 km, total 300 km, pile poil !


Je mène la danse pour remettre le train sur ses rails, et retrouver la Route des Champs. Direction Ouest, on va en avoir pour notre argent, il faut payer le prix de notre belle poussette du matin. 

Gilles, Simon, Kathia et moi-même tirons le gruppetto à tour de rôle. Il faut se protéger du bon côté pour profiter de l'effort de ceux qui sont devant. Certains ne l'ont pas encore bien compris, c'est primordial si on veut économiser des forces. 

On the road again !

Passé Rougemont, Pierre prend un relais bien appuyé, ce qui fait exploser le groupe en deux. Simon et Kathia, en plein papotage, se font surprendre, ils n'ont pas accroché les wagons. 

Avec Martin, nous devons sprinter pour rejoindre les quatre échappés. Un peu énervé je l'avoue, j'engueule gentiment Pierrot. Par moment, notre breton roule par à-coup, ce qui n'est pas toujours compatible avec la conduite régulière d'un peloton.

Pierrot en mode CLM, en train de faire exploser le gruppetto

Du coup, le gruppetto ralentit. Une charmante demoiselle nous dépasse à vive allure. Je ne peux m'empêcher de sauter dans sa roue, ce qui amuse la galerie ! 

À Marieville, je remercie ma partenaire éphémère, pour le lift de quelques centaines de mètres. Légèrement détaché, je tourne à droite pour éviter la route encore barrée d'un pont en reconstruction. 

J'attends mes compagnons et m'aperçois que nous avons perdu la moitié des effectifs. Gaby, Jocelyn et Kathia m'ont suivis tandis que Simon emmène Gilles, Martin et Pierre dans une expérience de cyclo-cross. Le pont est bel et bien inutilisable, ils doivent franchir le ruisseau les pieds dans l'eau. De quoi faire de bons souvenirs !

Dans la série, les aventures de Simon !

Règle numéro 2, réfléchir à deux fois avant d'embarquer dans les folies de Simon. Résultat, aventure et rigolade garanties !

De notre côté, nous devons progresser dans le vent de face, réduit à quatre unités. Nous attrapons la bande cyclable de la 112, toujours très achalandée. Traversée du Richelieu puis passage aux rapides de Chambly. J'adore cette petite route avec de belles maisons au bord de la rivière. 

Route à Chambly longeant les rapides

Le dernier secteur boisé par la piste cyclable nous ramenant vers la rive sud, est apprécié de tous. Nous y faisons un arrêt pipi à la demande de Jocelyn. 

Encore quelques coups de pédale bien appuyés pour arriver au bout de la piste de St Hubert, puis nous bifurquons à gauche sur Churchill. Ouf, finito les assauts du vent. Nous rattrapons Emmanuel, le poor lonesome randonneur ! 

Once upon a time in the West ... un ultime effort !

Les kilomètres s'accumulent sur mon odomètre. Je me rends compte que je n'aurais pas un beau 300 tout rond à l'arrivée. Je prends une rue transversale pour effectuer un 500 mètres supplémentaires ... et voir apparaitre le nombre magique ! 

3 0 0  k m   !!!

Un peu maniaque, le gars !



Épilogue


Je rejoins mes compagnons à l'ultime checkpoint de St Lambert. Le soleil est encore présent pour saluer notre réussite. Il est 19h43, soit 13h43 pour boucler ce 300, mon meilleur temps sur cette distance. La moyenne élevée du matin a bien aidé, et le parcours était ... sans difficulté notoire ! Certains l'auront parcouru en 11h à plus de 32 de moyenne. 

Simoné, ben fier de ses folies !

Le groupe de Simon rejoint la base une dizaine de minutes plus tard. Les quatre aventuriers du pont perdu, nous racontent leurs exploits pour passer le torrent déchainé. Leurs chaussures ont gardé quelques stigmates de bouette !

Vive la bouette sur les shoes de Gilles

On s'enfile une dernière boisson, on se félicite pour cette belle journée d'effort, de joie et de souffrance, partagée ensemble. 

Les 9 mercenaires satisfait de leur chevauchée (manque Pierre qui fait la baboune)

Tel est le karma du randonneur. Les bons et les moins bons moments se sont succédés au fil de la journée. Au final, nous ressentons le bien être et la satisfaction d'être passés au travers, pour atteindre l'objectif fixé. 

Chacun à son allure, pour le plaisir de tous.

Amen !

Vive le CVRQ !